28/02/2025
RAMADAN ET DIABÈTE
QUE SE PASSE-T-IL DANS MON ORGANISME LORSQUE JE JEÛNE ?
Le glucose est la molécule énergétique privilégiée utilisée en permanence par la plupart des cellules qui le prélèvent dans le sang. Malgré un apport discontinu de glucose (au cours des repas) et une utilisation cellulaire permanente mais d’intensité variable en fonction de l’activité et des dépenses énergétiques, la glycémie est maintenue dans un intervalle constant de valeurs (4 à 6,05 mmol/L ou 0,7 à 1,1 g/L à jeun, inférieure à 8 mmol/L ou 1,4 g/L deux heures après le repas). C’est l’homéostasie glycémique dans laquelle le foie joue un rôle majeur. Lorsque vous mangez, tout le glucose n’est pas utilisé immédiatement : une partie est stockée, essentiellement dans le foie, sous forme de glycogène. Lorsque vous jeûnez, la quantité de glucose circulant diminue, la production d’insuline aussi et, sous cette action, votre foie va commencer à libérer ses réserves. Mais les réserves hépatiques ne sont pas infinies et ne permettent de couvrir qu’environ 24 heures de jeûne.
Après ces 24 heures, d’autres mécanismes se mettent en marche : du glucose peut ainsi être fabriqué à partir des protéines (muscles) ou des acides gras (tissu graisseux).
Ainsi, la production de glucose va se poursuivre jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de substrat. Si le jeûne se poursuit trop longtemps, ces phénomènes adaptatifs vont être dépassés, et les conséquences vont se faire sentir. La production hépatique de glucose est altérée lorsque vous êtes diabétique, la sécrétion d’insuline n’est pas non plus normale, et vous pouvez parfois prendre des médicaments qui la stimulent : tout ceci peut entraîner des conséquences beaucoup plus rapidement délétères en cas de jeûne.
Le diabète de type 1 :
Chez les patients atteints de diabète de type 1, le corps ne produit pas d'insuline, une hormone essentielle pour la régulation de la glycémie. Le jeûne prolongé peut entraîner une variation de la glycémie, soit par hypoglycémie (taux de sucre trop bas) en raison de l’action de l’insuline administrée, soit par hyperglycémie (taux de sucre trop élevé) si le contrôle de la gestion des repas et de l'insuline n'est pas optimal. La gestion des doses d’insuline pendant le jeûne doit être soigneusement ajustée, car un jeûne sans nourriture peut mener à une baisse des besoins en insuline, tandis que l’hyperglycémie peut être induite par des variations hormonales et un stress physique.
Le diabète de type 2 :
Dans le cas du diabète de type 2, qui est lié à une résistance à l’insuline, le jeûne peut avoir des effets contradictoires. Les patients peuvent bénéficier d’une diminution de la glycémie à court terme, particulièrement dans le cadre d’un jeûne intermittent, ce qui améliore la sensibilité à l'insuline. Cependant, si le jeûne est mal géré, des risques d’hypoglycémie peuvent également survenir, surtout si les médicaments oraux ou l’insuline sont administrés sans prendre en compte les périodes de jeûne.
QUELS SONT LES RISQUES QUE J’ENCOURS LORSQUE JE SUIS DIABÉTIQUE ?
Le jeûne sans surveillance appropriée peut entraîner plusieurs risques majeurs pour les personnes diabétiques. Ces risques peuvent entraîner des conséquences graves, voire des urgences médicales :
• Hypoglycémie :
L'hypoglycémie, ou un taux de sucre sanguin trop bas, est l’un des risques majeurs associés au jeûne pour les diabétiques
• Hyperglycémie :
L’hyperglycémie, caractérisée par un taux de glucose sanguin trop élevé, est également un risque pour les diabétiques pendant le jeûne. Cela peut survenir en raison de la résistance accrue à l'insuline pendant les périodes de jeûne prolongé, ou en raison d'une alimentation excessive lors des repas de rupture de jeûne.
• Acidocétose
L’hyperglycémie se manifestera par une soif intense et une envie fréquente d’uriner. Une quantité élevée de glucose circulera dans votre sang et votre organisme, en manque d’insuline, ne pourra plus utiliser ce glucose pour nourrir vos cellules. Votre organisme va alors dégrader les graisses pour survivre et produire de l’acétone.
L’acétone va acidifier le sang et, si rien n’est entrepris, vous allez donc arriver en état d’acidocétose avec nécessité d’apport urgent d’insuline (la plupart du temps en milieu hospitalier). Il s’agit d’une grave complication du diabète.
• Déshydratation et déséquilibre électrolytique :
Le jeûne peut également entraîner une déshydratation, particulièrement si l'apport en liquides est insuffisant. Cela est particulièrement dangereux pour les diabétiques, car la déshydratation peut entraîner des troubles électrolytiques, exacerbant les déséquilibres glycémiques et augmentant le risque de ketoacidose diabétique (en particulier chez les diabétiques de type 1).
AFIN QUE LE JEÛNE SOIT FAIT EN TOUTE SÉCURITÉ, IL EST PRIMORDIAL DE LE PLANIFIER AVEC SON MÉDECIN.
• Points à revoir avec son médecin
L’état de santé général;
Le contrôle du diabète;
Les risques du jeûne;
La médication;
La surveillance de la glycémie.
Maintenir de saines habitudes de vie
• Lorsque le jeûne est rompu :
Garder un horaire stable pour les repas.
Éviter le grignotage continu.
Consommer des repas équilibrés.
Boire beaucoup d’eau.
Lors du Sahour (repas avant le lever du soleil), privilégier les aliments contenant des glucides à absorption lente (haricots, pain, riz, lentilles, épinard, pomme de terre, ignames, patates douces).
Lors de l’Iftar (repas à la rupture du jeûne), débuter par des aliments contenant des glucides à absorption rapide (fruits, dattes) puis consommer des aliments contenant des glucides à absorption lente.
• En tout temps :
Éviter les activités physiques d’intensité élevée : Vous devez limiter votre activité physique et sportive durant la période de jeûne (particulièrement en cas de forte chaleur).
Mesurer la glycémie fréquemment : Vous devez effectuer au moins une glycémie capillaire avant chaque repas et deux pendant le jeûne.
Si un problème survient, consulter un médecin.
Vous devez équilibrer votre alimentation sur 2 ou 3 repas pendant la rupture du jeûne. Par exemple, évitez une grosse collation à 18h et un repas à 22h parce que l’apport est rapidement très calorique et augmente considérablement votre glycémie. Privilégiez un seul repas.
Rompre le jeûne si vous sentez les signes d’hypoglycémie (sueurs, palpitations, tremblements, faim intense, trouble de la concentration…) ou d’hyperglycémie (vomissements/nausées, transpiration excessive, étourdissements, palpitations, fatigue, palpitations, anxiété...)
Dr Jérome TIEMTORE
Médecin
Coordonnateur de Hygie Burkina