06/11/2024
La pensée recule dans le monde entier.
Le débat violent et intolérant prend de plus en plus le pas sur la liberté et les originalités. Partout fleurissent des idées préfabriquées qui assombrissent les horizons et les réalités. L'humilité déserte les cœurs et les cerveaux. Il est important de le dire afin de résister à l'uniformisation, aux catégorisations réductrices. Les sciences, notamment humaines, on peut dire du comportement, n'échappent pas à cette tendance. C'est une chance de penser en psychanalyste. Ce dernier met toujours l'humain, son désir, le conflit, au centre de sa pensée. Il s'agit toujours d'une vérité individuelle et relative à traquer, même si des lois générales existent. Sa place fragile dans le monde actuel constitue un symptôme majeur des formatages actuels des vérités et des hommes. Les pouvoirs et les idéologies fermés, ont du pain béni avec ces multiples réductionnismes créateurs de recettes superficielles et accélérées pour tout. Exemple " on sait maintenant qu'un cerveau complimenté fonctionne mieux". Est-ce le cerveau qui est encouragé ou est-ce l'enfant? Quand l'amour et la sécurité qu'il apporte sont réduits à la chimie du cerveau et à une liaison superficielle au comportement, l'humain s'efface. Il devient de simples molécules, une machinerie mécanique. Pourtant on sait que la nature des activités, à commencer par la plus fondamentale, l'acte de pensée, influe sur la chimie du cerveau. L'hormone dite du bonheur n'est pas sécrétée par une simple activité. Elle est associée au plaisir. Ce n'est pas le simple acte de courir qui induit le processus. Ce dernier découle du plaisir que procure cette activité. L'explication biologique, génétique, n'est pas antinomique de l'explication psychologique. Ce sont des niveaux d'explications différents qui portent sur des vérités différentes. L'une ne peut pas se substituer à l'autre. Pourtant c'est ce qui s'impose actuellement comme vérité, au dépend de l'essence humaine qu'on réduit à une peau de chagrin. C'est ce qui fait penser que le monde sera triste sans psychanalyse qui est dans la complexité, au cœur de la subjectivité humaine. Elle ne réduit pas l'humain à des actes partiels charcutés avec une rigueur et une objectivité apparente, plus déclarée que réelle. Les sciences du comportements ( neuro..) participent donc dangereusement à cette parcellisation opérationnelle de réalités plus complexes, interconnectées et difficilement objectivables. Même dans le corps, les molécules et les fonctions sont interconnectées. Ces vérités scientifiques de formatages techniques, favorisent les clichés réducteurs de l'humain. Ils induisent des schémas de pensées d'allures cognitifs, comportementaux simples et séducteurs. Là où la vie, l'humain sont beaucoup plus dynamiques et insaisissables. Le progrès humain, son développement ne peut se faire qu'en remettant son respect en tant que totalité, à commencer par sa liberté d'être et de pensée. Créer des molécules pour tout, des recettes trompeuses pour chaque segment, ne peut que favoriser la superficialité, l'instrumentalisation et une simplification dangereuses. Les sciences qui tendent fortement dans cette direction donnent des forces aux acteurs nombreux qui ne se soucient pas du destin du monde et de ses habitants. Penser librement, voire penser tout court, tend à devenir un acte de résistance à une déshumanisation rampante. Dans un monde où la science tend à une opérationnalisation technique au dépend d'une démarche de vérification contrôlée. Que dire de nos sociétés où le système éducatif, voire universitaire, se nourrit plus d'idéologies et de vérités toutes faites ? Un environnement où même dans la famille on réduit fortement la curiosité et les choix de l'enfant. En évoquant ce recul assez général de la liberté et de la pensée, on se dit que les débats souvent violents, observés sur les réseaux sociaux, ont un aspect salutaire, voire sanitaire. En effet, il vaut mieux des échanges conflictuels, qui permettent de réfléchir, que des uniformisations paresseuses qui distillent des vérités. C'est sans doute pourquoi beaucoup d'entre nous persistent à être sur les réseaux sociaux. On cherche à exister et à donner sens à nos vies. Le faire avec un peu de tolérance et de respect de l'autre serait formidable. C'est en sens que les vérités scientifiques trop radicales sont pernicieuses. On oublie qu'elles sont des hypothèses fort plausibles "jusqu'à preuve du contraire". La pensée profane est plus aléatoire, plus discutable et doit être encore plus humble.