Faire de l’écriture un moyen de créer du lien
Il y a une bonne vingtaine d’années, je me souviens qu’il se disait que les ordinateurs allaient progressivement nous détourner de l’activité d’écrire. Au final, cela ne s’est pas produit...Bien au contraire ! Force est de constater que, loin d’avoir disparu, l’écrit est partout aujourd’hui, s’imposant comme un vecteur fondamental dans la communication humaine. Sur les écrans, nous produisons des messages écrits à longueur de temps : sur les réseaux sociaux, dans des mails, dans des SMS...et, aujourd’hui, il n’y a pas d’âge pour cela, et c’est tant mieux ! Communiquer par écrit, c’est, plus que jamais, être en lien avec le monde et se sentir exister...
Écrire est donc une activité sociale, pour laquelle tout un chacun peut avoir besoin de conseils avisés, car il n’est pas si simple de rédiger un courrier argumentatif en cas de litige avec une administration, une assurance, un bailleur...Pas simple non plus de retracer avec synthèse et précision son parcours professionnel dans le cas d’un projet de reconversion, d’une VAE, d’une demande de changement de poste...Pas simple enfin, dans certaines circonstances de la vie personnelle, d’écrire une lettre intime à un proche. Il faut être délicat et trouver les mots justes. J’ai souvent été sollicitée par mon entourage pour aider à écrire un courrier complexe, pour élaborer et mettre en forme un CV, pour relire et corriger un texte quel qu’il soit ( plaquette publicitaire, discours, rapport de stage ou mémoire...). Mon métier de professeur de Français faisait de moi, en quelque sorte, une “experte”, dont on acceptait les recommandations. Avec le temps, une évidence m’est apparue : ces activités d’écriture, réécriture et correction, complémentaires à mon métier d’enseignante, me plaisaient vraiment. Elles concernaient tous types d’écrits, dans toutes les situations de la vie, ce qui me changeait des dissertations et autres devoirs scolaires. Je me suis dit alors que je pourrais peut-être mettre mes compétences rédactionnelles au service de tous, quel que soit l’âge, le milieu social, l’expérience de vie, car c’est justement cette diversité des rencontres qui s’avère extrêmement enrichissante.
C’est ainsi que j’ai décidé de me former au métier d’Écrivain public-Conseil en écriture professionnelle et privée. J’ai réussi les sélections pour intégrer la Licence Professionnelle de la Sorbonne Nouvelle, qui dispense depuis plus de 15 ans un enseignement incluant droit, culture numérique, psychologie sociale, rhétorique, linguistique, etc., et visant à transformer ce vieux métier en profession innovante, en phase avec le monde actuel. Cette belle aventure m’a permis d’exploiter un domaine que j’aimais déjà beaucoup expérimenter en classe avec mes élèves : les ateliers d’écriture, que j’ai d’ailleurs convertis plus largement en “ateliers d’expression”, que celle-ci soit écrite ou orale. Au cours de ces ateliers, accessibles à tous, je m’appuie sur mes connaissances littéraires et artistiques, pour animer des séances souvent très joyeuses, au cours desquelles les participants partagent leurs regards sur le monde, leurs souvenirs, leurs vécus. Ces rencontres font un bien fou ! Elle stimulent l’intellect : mémoire, réflexion, sens de l’observation... Dans le cadre de ces ateliers, j’utilise l’écrit notamment comme un moyen de restituer la parole de chacun, ce qui a pour effet, à terme, de cimenter le groupe des participants et de réveiller l’estime de soi.
Mais, écrire, c’est aussi une activité d’ordre plus intime. On éprouve parfois le besoin de mettre par écrit ses moments de vie, heureux ou douloureux. On se confie, on s’épanche, on s’exprime, et cela fait du bien. Déjà, au 16 ème siècle, le poète Du Bellay soulignait le rôle thérapeutique que peut parfois jouer l’écriture :”Je me plains à mes vers si j’ai quelques regrets, Je me ris avec eux, je leur dis mon secret, Comme étant de mon cœur les plus sûrs secrétaires”. J’ai expérimenté cela bien des fois, et je sais que nous sommes nombreux(ses) dans ce cas ! Puis, il arrive un jour où l’on se dit qu’on aimerait bien faire quelque chose de tous ces souvenirs, de ces notes, de ces carnets, de ces photos aussi... Raconter son vécu pour que celui-ci soit lu un jour, pourquoi pas ? Les accidents de la vie, la maladie, la perte d’un être cher donnent parfois un coup d’accélérateur à ce lointain projet, qui n’a pas besoin d’attendre le nombre des années pour se réaliser. Qu’il s’agisse de l’écriture d’une biographie complète ou de la rédaction d’un récit de vie portant sur une période en particulier de l’existence, l’écrivain public que je suis devient alors une biographe, dont la mission consiste à accompagner dans la mise en mots toutes celles et ceux qui ont le désir de transmettre leur histoire. Le lien toujours, avec les autres, mais aussi, à travers ce cheminement introspectif, avec soi-même.