12/10/2024
Semaine de la « Santé mentale et numérique », jour 6 : « Écrans chez les enfants : dois-je contrôler ? » 📺
Manon Demonty - neuropsychologue nous explique tout ça dans le post ci-dessous ⬇️
SEMAINE DE LA SANTE MENTALE - JOUR 6 : Mon enfant consulte des écrans, dois-je contrôler ?
𝙴𝚝𝚊𝚝 𝚍𝚎𝚜 𝚕𝚒𝚎𝚞𝚡 𝚍𝚎 𝚕𝚊 𝚌𝚘𝚗𝚜𝚘𝚖𝚖𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗 𝚍’𝚎́𝚌𝚛𝚊𝚗𝚜 𝚌𝚑𝚎𝚣 𝚕𝚎𝚜 𝚎𝚗𝚏𝚊𝚗𝚝𝚜 𝚎𝚝 𝚊𝚍𝚘𝚕𝚎𝚜𝚌𝚎𝚗𝚝𝚜
Il est fréquent d’entendre parler des écrans comme quelque chose de « néfaste » ou « mauvais » pour nos enfants 👎🏻. Qu’en est-il vraiment ?
Il existe, à l’heure actuelle, peu de consensus quant aux réels impacts des écrans. Pour une première raison, déjà, qui est l'importance de distinguer les TYPES d’écrans concernés. En effet, les impacts d’une consommation de jeux vidéo (et encore, il s’agirait de distinguer lesquels) seront évidemment différents de la consommation des réseaux sociaux.
En 2020, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) en France a été mandaté pour une analyse des données scientifiques sur les effets de l’exposition aux écrans chez les enfants et les jeunes. S’il reste encore compliqué d’atteindre un consensus entre les études (en raison, notamment, d’un manque de données), en voici en bref résumé :
AU NIVEAU DE LA SANTE PHYSIQUE 🩺 : si des risques sont suspectés sur différentes variables comme la vision, l’audition et l’hygiène alimentaire, l’impact néfaste sur le sommeil est plus largement documenté ; on constate un impact en fonction du temps passé sur les écrans et sur les horaires de consultation. Rappelons que le sommeil est un facteur associé à de très nombreuses variables de santé physique et mentale.
AU NIVEAU DU DEVELOPPEMENT COGNITIF 🧠 : les analyses suggèrent des effets nuancés sur le développement cognitif, et parfois même, des effets positifs (par exemple, des jeux vidéo dans une certaine mesure), dans le cadre bien sûr d’un usage réfléchi, encadré et accompagné.
AU NIVEAU PSYCHOLOGIQUE 👥 : dans une certaine mesure, le recours aux écrans peut avoir des effets positifs (émotions, isolement) ; cet effet positif ne doit pas masquer les conséquences négatives, surtout d’un usage excessif, sur la santé mentale de certains jeunes ; une méta-analyse plus récente (Santos et al., 2023) suggère un effet négatif sur l’anxiété et la dépression des adolescents de l'usage des réseaux sociaux et des smartphones, mais pas tant de la télévision ou des jeux vidéo (dans certaines conditions).
AU NIVEAU SCOLAIRE ✏️: à nouveau, l’effet est dépendant de la vulnérabilité de base de l’enfant ET des objectifs d’utilisation des écrans (par exemple, consulter les écrans pour le travail scolaire serait plutôt positif).
𝙳𝚒𝚜𝚌𝚞𝚜𝚜𝚒𝚘𝚗 𝚜𝚞𝚛 𝚕𝚊 𝚗𝚘𝚝𝚒𝚘𝚗 𝚍𝚎 « 𝚝𝚎𝚖𝚙𝚜 𝚍’𝚎́𝚌𝚛𝚊𝚗 »
Si la section suivante aborde les recommandations formulées en termes de consommation d’écrans chez les enfants, il est important de rappeler que, après la pandémie de Covid-19 🦠, l’usage des écrans a énormément changé chez les jeunes comme les moins jeunes.
Une méta-analyse récente (Madigan et al., 2022) révèle une augmentation de 52 % de l’usage des écrans chez les enfants et adolescents pendant la période Covid. Dans ce contexte, les études sur le sujet prennent de moins en moins en compte le TEMPS ⏱️ d’écran consulté, mais mettent le focus sur d’autres variables : le TYPE d’écrans consultés, l’OBJECTIF poursuivi lors de la consultation des écrans, la COMMUNICATION et l’EDUCATION parentale autour des écrans, et même l’ENDROIT où l’enfant consulte (par exemple, télévision dans la chambre, smartphone personnel).
𝚁𝚎𝚌𝚘𝚖𝚖𝚊𝚗𝚍𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝚜 𝚘𝚏𝚏𝚒𝚌𝚒𝚎𝚕𝚕𝚎𝚜 𝚎𝚗 𝚖𝚊𝚝𝚒𝚎̀𝚛𝚎 𝚍’𝚎́𝚌𝚛𝚊𝚗𝚜 𝚌𝚑𝚎𝚣 𝚕𝚎𝚜 𝚎𝚗𝚏𝚊𝚗𝚝𝚜
En Belgique et en France, on retrouve sur de nombreuses ressources les recommandations suivantes, basées sur les repères 3-6-9-12 :
❌ Pas d’écrans avant 3 ans
❌ Pas de jeux vidéo avant 6 ans (les études recommandent d’éviter les images en 3D avant 5 ans)
❌ Pas d’internet seul avant 9 ans
❌ Pas de smartphone et réseaux sociaux avant 12 ans
Ces repères sont accompagnés d’une série de recommandations, portant à la fois sur le temps d’écrans, mais aussi sur les types d’écrans qui sont consultés par les enfants et sur l’endroit où ils sont consultés. Les recommandations mettent également un point d’honneur à l’éducation de son enfant vis-à-vis des écrans : l’informer des risques et des implications d’internet, ouvrir une discussion sur les éventuels dangers, ou encore s’intéresser à ce que consulte son enfant/ado.
➡️ Pour plus d’infos : https://www.yapaka.be/ecrans
Au Québec, des recommandations similaires ont été formulées, notamment relativement au temps d’écrans : aucun écran avant 2 ans, moins d’une heure et pas plus de 30 minutes d’affilée entre 2 et 5 ans, et moins de deux heures entre 6 et 12 ans. Les recommandations mentionnent également une vigilance pour le contenu, en encourageant bien sûr l’usage éducatif et ludique des écrans.
➡️ Pour plus d’infos : https://www.quebec.ca/sante/conseils-et-prevention/saines-habitudes-de-vie/utilisation-saine-des-ecrans-chez-les-jeunes
Enfin, des recommandations spécifiques en termes horaires sont à rappeler : il est globalement admis que les écrans doivent avoir été éteints 1h avant le coucher (note : pour les adultes aussi 😊).
𝙹𝚎 𝚜𝚞𝚒𝚜 𝚙𝚊𝚛𝚎𝚗𝚝, 𝚌𝚘𝚖𝚖𝚎𝚗𝚝 𝚏𝚊𝚒𝚛𝚎 𝚙𝚘𝚞𝚛 𝚛𝚎́𝚐𝚞𝚕𝚎𝚛 ?
Les parents se posent fréquemment cette question, voire culpabilisent à ce sujet. Des divergences d’utilisation d’écrans sont constatées entre les parents, et cela mène à de nombreuses questions sans réponse. Sur base des lectures précédentes, nous pouvons formuler quelques conseils généraux.
✅ Réguler le TEMPS passé sur les écrans, tout en tenant compte de la réalité du contenu consulté par l’enfant : Il sera nécessaire, bien sûr, de contrôler le nombre de minutes que votre enfant passe devant les écrans ainsi que les horaires auxquels il les consulte. On évitera par exemple des écrans tôt le matin avant d’aller à l’école et une heure avant le coucher. N’oublions toutefois pas de rencontrer la réalité de son enfant et d’émettre une discussion avec lui quant à sa consommation d’écrans : on ne coupera pas la TV d’un enfant après 30 minutes si on a accepté qu’il commence un épisode de 40 minutes, et on évitera de couper le courant de la console de son adolescent s’il est en plein milieu d’une partie non-sauvegardée.
✅ Vérifier le CONTENU consommé par l’enfant : comme décrit ci-dessus, il n’est pas recommandé de donner accès à internet sans surveillance avant 12 ans. Si certains logiciels permettent de limiter les pages Web auxquels votre enfant a accès, cela n’est pas si aisé pour les contenus « rapides » ou « instantanés » comme sur TikTok, Instagram, les shorts de YouTube ou Snapchat. S’il existe parfois des versions « kids » des applications, il reste recommandé d’accompagner son enfant dans les vidéos, contenus et épisodes qu’il visionnera. L’accompagnement peut se faire, par exemple, en limitant l’accès à ces applications sur le téléviseur familial, ou sur base d’une vérification en amont du parent. Avant 12 ans, il semble très peu recommandé d’accorder l’accès à des applications fonctionnant sur base d’algorithmes sans version « kids » (bien qu’une vigilance soit aussi recommandée sur ces versions). À l'adolescence, la communication est essentielle.
✅ Surveiller son propre rapport aux écrans en tant qu’ADULTE : si les écrans prennent de plus en plus de place dans la vie des enfants, c’est également le cas pour les adultes. Il est dès lors important de contrôler et réguler sa propre consommation d’écrans pour proposer à son enfant un exemple cohérent et dégager du temps de qualité en famille.
✅ Utiliser les écrans pour leur aspect SOCIAL et FAMILIAL : les écrans ont bien sûr des aspects positifs et il serait contre-productif de les diaboliser. Dans un souci de passer du temps de qualité ensemble ET de vérifier ce que consulte son enfant, partager un moment ensemble autour d’un écran semble une excellente idée. Il peut s’agir de regarder un film ou un documentaire avec son enfant, ou encore de jouer avec lui à son jeu vidéo préféré.
𝚁𝚎𝚜𝚜𝚘𝚞𝚛𝚌𝚎𝚜
Haut Conseil de la santé publique. (2020). Analyse des données scientifiques : effets de l’exposition des enfants et des jeunes aux écrans. https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=759
Madigan, S., Eirich, R., Pador, P., McArthur, B. A., & Neville, R. D. (2022). Assessment of Changes in Child and Adolescent Screen Time During the COVID-19 Pandemic. JAMA Pediatrics, 176(12), 1188. https://doi.org/10.1001/jamapediatrics.2022.4116
Qi, J., Yan, Y., & Yin, H. (2023). Screen time among school-aged children of aged 6–14 : a systematic review. Global Health Research And Policy, 8(1). https://doi.org/10.1186/s41256-023-00297-z
Santos, R. M. S., Mendes, C. G., Bressani, G. Y. S., De Alcantara Ventura, S., De Almeida Nogueira, Y. J., De Miranda, D. M., & Romano-Silva, M. A. (2023). The associations between screen time and mental health in adolescents : a systematic review. BMC Psychology, 11(1). https://doi.org/10.1186/s40359-023-01166-7