20/09/2024
Il est frappant de constater comment une partie de la presse, souvent dictée par le besoin de se démarquer et la quête de sensationnalisme, traite des sujets complexes. En Belgique, cela se traduit régulièrement par copié-collé d'agences de presse, sans creuser plus loin, tout en prétendant à un professionnalisme exemplaire. À titre d'exemple purement métaphorique, lorsque certains médias croisent un "malade en phase critique", ils semblent s'empresser de lui creuser une tombe avant même d'avoir consulté son acte de décès, aggravant ainsi les souffrances du patient.
C'est exactement ce qui se passe avec Tupperware ces derniers temps. L'entreprise subit effectivement de graves difficultés, confrontée à des problèmes financiers très importants. Cependant, elle n'est pas encore condamnée, malgré les nombreux médias qui se sont précipités pour annoncer sa fin.
Les médias ont donc rapporté que Tupperware serait en « faillite » ou aurait « déposé le bilan », laissant entendre que l'entreprise est désormais condamnée. Cette interprétation est erronée. En réalité, Tupperware a demandé et obtenu une protection sous le Chapitre 11 de l’US Bankruptcy Code (Tribunal des faillites des Etats-Unis), ce qui ne signifie pas nécessairement qu'elle est en liquidation ou qu'elle doit cesser ses activités. Cette procédure permet à l'entreprise de continuer à fonctionner tout en préparant une restructuration de ses dettes. Elle dispose ainsi de 120 jours (éventuellement prolongeables, la décision appartient à l’US Bankruptcy Court) pour soumettre un plan de réorganisation, sans subir de menace directe de ses créanciers. Ce plan sera par la suite négocié avec notamment ses créanciers.
Malheureusement, le terme "faillite" est souvent mal utilisé et peut induire en erreur. Il désigne une incapacité à honorer des obligations financières, entraînant généralement une intervention judiciaire pour résoudre cette situation d'insolvabilité. Dans le cas de Tupperware, la protection sous le Chapitre 11 permet à l'entreprise de continuer ses opérations tout en élaborant ce fameux plan de redressement.
Le Chapitre 11 est un outil puissant, souvent confondu avec le Chapitre 7, qui lui, entraîne la liquidation complète des actifs d'une entreprise sans autre issue. Cette confusion provient probablement du fait que le terme "faillite" est, chez nous, généralement associé à l'arrêt des activités et la vente des actifs pour rembourser les créanciers. Ce n’est pas le processus du Chapitre 11 qui, lui, offre aux entreprises une chance de surmonter leur surendettement.
De nombreuses entreprises ont réussi à se restructurer grâce au Chapitre 11, en adoptant même parfois des pratiques de développement durable. Par exemple, Westinghouse Electric Company a maintenu son engagement envers une production d'énergie à faibles émissions de carbone après sa réorganisation en 2017. D'autres entreprises comme General Motors et Delta Air Lines ont également tiré parti du Chapitre 11 pour redresser leurs finances.
Il est important de noter qu'une étude menée par le Journal of Corporate Finance a révélé qu'environ 10 % à 15 % des entreprises, toutes tailles confondues, qui suivent le processus du Chapitre 11 réussissent à se réorganiser avec succès. Néanmoins, selon une analyse de Harvard Law School, environ 70 % à 80 % des grandes entreprises (comme Tupperware) réussissent leur restructuration grâce à un meilleur accès aux ressources et à un encadrement professionnel adéquat.
Au risque de me répéter, il est donc essentiel de ne pas interpréter le terme "faillite" comme synonyme d'arrêt définitif d'une entreprise. Bien que Tupperware traverse une période difficile, elle reste opérationnelle et continue ses activités avec l'objectif de se redresser grâce au Chapitre 11.
Pour revenir sur ma métaphore initiale, Tupperware est un patient admis à l'hôpital pour traiter une maladie grave mais traitable. Le Chapitre 11 agit comme un traitement intensif, offrant les ressources nécessaires pour se réorganiser sous surveillance rigoureuse. Bien que la situation soit critique, cela ne signifie pas la mort de l'entreprise ; c'est plutôt une étape vers une tentative de guérison.
En conclusion, seul l'avenir nous dira quelle sera l'issue finale pour Tupperware. Nous pouvons néamoins affirmer aujourd'hui, c'est que l'entreprise existe toujours et reste pleinement opérationnelle, avec ses produits disponibles pour ses clients. En Belgique notamment, plus de 3000 conseiller.e.s indépendant.e.s continuent de travailler dur pour gagner leur vie tout en devant affronter les défis liés à l'image déformée véhiculée par certains titres hâtivement alarmistes dans les médias.