Le trouble de la personnalité limite (TPL) est une maladie mentale caractérisée par une instabilité émotionnelle. Les individus aux prises avec ce trouble ont du mal à maîtriser leurs impulsions et à maintenir des relations interpersonnelles.
Ces gens présentent des réactions excessives face à l’abandon, à l’invalidation et à l’injustice. Ils ont une faible estime d’eux-mêmes, des humeurs fluctuantes, une rage intérieure déstabilisante et un sentiment de vide que rien ne peut apaiser.
Nous savons que le trouble tient son origine dans l’enfance. Une fragilité biologique et un environnement non adapté à ces fragilités entraînent des blessures dans l’identité, dans la gestion des émotions et dans l’interprétation de la réalité avec ses propres références.
Ce sont des enfants qui ont eu l’impression de ne pas avoir été aimés adéquatement, de ne pas avoir été respectés ou encore qui ne se sont pas sentis en sécurité durant leur enfance.
L’apprentissage des limites et d’un cadre n’a pas souvent été optimal, ce qui entraîne un besoin de confrontation avec celui-ci pour réaliser où est la ligne entre l’acceptable et l’interdit. .
Ces personnes répondent habituellement bien à un encadrement chaleureux et bienveillant après, bien sûr, quelques confrontations avec celui-ci.
Ces gens, porteur d’une rage intérieure, sont à la recherche d’un lieu où évacuer temporairement celle-ci. Un conflit, une bataille, une revendication excessive permettent d’apaiser momentanément cette rage déplacée sur l’adversaire choisi. Ceci entraîne un malaise chez l’autre et un apaisement chez le TPL. Ce soulagement étant de courte durée, les TPL repartent rapidement à la recherche d’un autre conflit.
Les idéations suicidaires sont présentes chez ces gens et c’est un enjeu crucial pour les intervenants. Les propos suicidaires ainsi que le conflit sont le discours du TPL, la monnaie d’échange entre lui et son environnement. C’est l’accent tonique sur l’émotion ressentie et un moyen de s’assurer que le message est bien reçu par l’interlocuteur.
De récentes études démontrent que ces gens vivent près de dix ans de moins que la population en général. Des chiffres encore plus élevés qu’en schizophrénie. Bien sûr, le risque suicidaire chronique en est un facteur, mais il y a aussi la toxicomanie et l’hygiène de vie bien souvent déficiente. Ces gens sont en mauvaise santé métabolique (obésité, sédentarité, excès ou privation alimentaire, manque de sommeil, pauvreté, abus de médicaments, violence, anxiété, etc.). Cette clientèle est surreprésentée dans nos urgences et dans les bureaux d’omnipraticiens.
Un autre élément remarquable est que durant un suivi thérapeutique à la fois validant, chaleureux et encadrant, les TPL s’apaisent et se restructurent. La fin des suivis est d’ailleurs souvent laborieuse, activant des blessures d’abandon et privant le TPL du cadre affectif qui le maintenait dans un effort de restructuration. Le risque suicidaire est décuplé aux sorties de l’hospitalisation de même que les rechutes sont fréquentes lorsqu’on envisage la fin du suivi.
Les objectifs
Pour l’ensemble de ces raisons, le concept de La Maison 100 Limites devient une alternative et un complément à la poursuite d’une structure enveloppante et chaleureuse. Une structure cependant permanente où le concept de congé n’existe pas. Un lieu où ces femmes pourront se retrouver entre elles d’une façon beaucoup moins ostracisante et isolante.
La Maison pourra servir de lieu d’hébergement temporaire à certaines jeunes femmes qui nécessitent un tremplin sécuritaire et structuré pour plonger dans une vie responsable et fonctionnelle.
Les autres femmes graviteront en externe dans la Maison en participant à des ateliers ou simplement en venant s’asseoir au salon ou à la cuisine pour y prendre un bon repas et briser par le fait même un moment de solitude ou de vide plus intense qui mène si souvent celles-ci à l’autodestruction. C’est un peu comme revenir chez soi, dans notre famille, auprès de gens qui nous reconnaissent et nous respectent afin d’y refaire le plein affectif et retourner, apaisée, affronter sa vie.
L’approche préconisée, qui consiste en un troc de services entre ces femmes, en lien avec les habiletés de chacune, fait de cette ressource communautaire un lieu d’apprentissage thérapeutique innovateur. En effet, la Maison veut amener ces femmes à miser sur leurs forces communes afin de les aider avec leurs grandes fragilités.
Josée, qui a de grandes difficultés relationnelles mais est habile avec les enfants, s’occupera de la fille d’Isabelle. Isabelle a beaucoup de mal à s’en occuper mais est habile au niveau des finances. Isabelle aidera Anne qui elle, a du mal à faire un budget, mais est forte au niveau relationnel. Elle viendra donc vers Josée pour l’amener à être plus à l’aise dans ses relations. Ainsi, telle une boucle, l’entraide se fera entre elles et les amènera à mieux gérer leurs fragilités par l’entremise de leurs forces.
Ces femmes sont des êtres remplies d’énergie, d’imagination, de générosité et d’hypersensibilité à l’injustice. Elles sont de fins stratèges relationnels et peuvent convaincre quiconque de ce qu’elles veulent. Elles aiment par-dessus tout aider, défendre, critiquer. Elles doivent cependant être dirigées, car leurs forces, si elles sont mal canalisées, peuvent mener à de grandes blessures.
Fragilités infantiles riment souvent avec maltraitance, abandons, DPJ, centre d’accueil, abus sexuel et autres traumatismes. Il est donc fréquent que ces enfants, issus des services sociaux se retrouvent à 18 ans, déjà passablement affaiblis au niveau affectif, dans les services de psychiatries pour adultes. Des études démontrent d’ailleurs que ces enfants viennent de mères elles-mêmes porteuses d’un TPL. Si ces jeunes filles ne sont pas rapidement soutenues et encadrées dans une structure éducationnelle adaptée et chaleureuse, elles transmettront irrémédiablement leurs propres fragilités à leur descendance. Comme une roue qui tourne, elles seront TPL de mère en fille.
Un rêve !
Créer La Maison 100 Limites, c’est tenter une approche novatrice. C’est créer avec ces femmes, à partir de la base, une Maison avec des assises solides sur lesquelles elles pourront s'appuyer pour tenter la restructuration de leur propre maison. Cette tâche de reconstruction se fera par le biais d'une communauté «d’aidées-aidantes» sous le signe de la bienveillance et du respect.
Vous joindre à nous dans cette aventure c’est nous offrir les matériaux nécessaires pour ériger cette Maison sur des bases solides. Ces femmes et les enfants de ces femmes le méritent bien.
On dit que ça prend un village pour élever un enfant. Selon nous, ça prendra une communauté pour guider ces femmes vers le rétablissement.