12/21/2025
PRENDRE SOIN DE SA SANTÉ, bis
“Je ne m’attendais pas à une telle déferlante de réactions quand, il y a trois semaines, j’ai chroniqué sur la part de responsabilité individuelle que nous avons face à notre santé.
Le point central de la chronique portait sur l’importance de la capacité cardiorespiratoire pour la santé globale, pour améliorer ses chances d’éviter cancers, diabète et autres plaies de santé.
Même une légère amélioration du cardio, du VO2 max, le simple fait de passer de la catégorie faible forme physique à la catégorie forme physique inférieure à la moyenne entraîne une réduction de la mortalité, sur un horizon de dix ans.
Vous avez été nombreux à m’écrire vos propres histoires d’épiphanie, de moment où vous avez compris qu’il fallait se prendre en main.
Parfois, une visite chez le médecin, qui vous lit la loi de l’émeute en décryptant vos résultats de laboratoire.
Ici, un cancer. Là, un infarctus.
Je disais : là-dessus, sur l’activité physique, le gouvernement n’a rien à voir (ou presque). On doit aussi se botter le derrière soi-même, bouger.
Danielle : « Il y a un an, mon conjoint et moi avons entrepris de faire une marche rapide d’une heure chaque jour, beau temps, mauvais temps en plus de changer notre alimentation et d’éliminer le sucre. J’ai perdu 30 livres et mon mari, 50, sans difficulté… »
Score des courses, euh, de la marche, après un an… Danielle a cessé ses médicaments pour l’hypertension car celle-ci est devenue trop basse : « Mon médecin m’a dit que si tout le monde faisait ça, les médecins manqueraient de travail. »
Josée, elle, a eu un diagnostic de cancer du côlon, fin 2021…
Docteur, vais-je mourir ?
Réponse du doc : « Je ne suis pas inquiet, vous allez vous en sortir. Mais je suis pas mal plus inquiet pour votre foie… »
Elle avait un foie gras.
Le médecin a simplement dit à Josée : « Vous savez ce que vous avez à faire. »
Josée a décidé de se prendre en main après son opération de janvier 2022, si je puis dire, en faisant bouger ses pieds : 18 500 pas par jour, comptés par sa montre intelligente, en plus d’entraînements réguliers à haute intensité.
Son VO2 max a explosé, son foie n’est plus gras, le diabète est parti, 105 livres en moins.
« Merci à mon chirurgien, dit-elle, pour le coup de pied dans le cul. »
J’ai reçu plusieurs témoignages du même genre. Des gens qui, sans être dans une forme pour faire le décathlon aux Jeux olympiques, sont capables de monter quelques paliers d’escaliers sans craindre de faire le 911.
Pour beaucoup, beaucoup de gens, le « sport » qui leur a permis d’améliorer un cardio en berne est le plus plate qui soit : la marche.
Quelques lecteurs progressistes m’ont sermonné sur le fait que ce n’est pas tout le monde qui peut bouger, courir, aller au gym, que tous ne résident pas dans le segment socioéconomique privilégié qui permet de « faire du sport »…
Mon message, c’est juste que quand on peut bouger plus, juste un peu plus, on devrait. Ça ne dépend que de soi, bien souvent. Mais chez ceux qui peuvent, il n’y en a pas assez qui le font.
Mon message, c’est que la sédentarité gagne du terrain. Et que la sédentarité nous tue à petit feu : en seulement six ans, le nombre de Canadiens qui marchent 7500 pas par jour a fondu. Il y a six ans, 49 % des Canadiens marchaient ce minimum recommandé ; nous ne sommes plus que 32 % à le faire…
Explication ? La pandémie a popularisé le télétravail, qui nous fait sortir moins souvent. Donc, même l’activité physique passive, celle de tous les jours, diminue. Nous sommes en passe de devenir des patates de salon.
Un chercheur en mobilité de l’Université McGill, Jérôme Laviolette, a apporté un bémol sur le fait que la décision de bouger commence et finit avec soi-même. Je le cite longuement parce qu’il a raison : je me suis un peu trop étiré le cou sur cette certitude que ça ne dépend que de nous…
« Rendre nos villes plus sécuritaires et plus agréables pour la marche et le vélo relève du gouvernement. Et ça, c’est permettre à davantage de gens de se déplacer à pied et à vélo, en mobilité active […]. »
— Jérôme Laviolette, chercheur en mobilité de l’Université McGill
« En somme, oui, il y a une question de choix individuels. Ce ne sont pas tous les résidants de quartiers marchables et cyclables qui marchent et qui pédalent pour se déplacer pour le loisir. Mais la proportion de gens qui le font est plus importante dans les quartiers marchables que dans les quartiers davantage orientés vers l’automobile… »
J’ajouterais encore, aussi : l’État devrait marteler le message que pour la moyenne des ours, bouger est la meilleure façon de visiter le médecin moins souvent.
Loi 2 ou pas, codes de couleurs ou pas, une façon de désengorger le système et de « libérer » des rendez-vous chez le médecin est une population qui bouge et qui a moins besoin de voir le doc.”