24/01/2023
Très intéressant
JE NE SAIS PAS AIMER MES ENFANTS...
➡ Je discutais le week-end dernier avec des amis et on s’est retrouvé dans une discussion très intéressante sur la parentalité. Sur les mots qu’on dit et les émotions qu’on transmet à nos enfants.
➡ Alors qu’on discutait, je me suis souvenu de quelque chose qui m’est arrivé il y a quelques semaines avec ma nièce. Ma nièce qui est mon premier enfant est une jolie poupée de 3ans. Elle s’avère être l’enfant de mon enfant qui est mon petit frère. Maintenant qu’elle sait parler, elle parle beaucoup beaucoup. Il y a quelques semaines alors que je discutais avec son père d’un sujet très sérieux, elle n’arrêtait pas de nous interrompre. Nous étions au téléphone et toutes les minutes elle venait demander quelque chose à son père. Et mon frère restait calme et patient. Il se tournait vers sa fille pour lui parler tranquillement et lui répondre. Il lui disait d’aller trouver maman dans la chambre mais elle revenait. A la troisième ou quatrième interruption, j’ai ressenti un petit agacement et j’ai eu envie de dire à mon frère de lui dire d’arrêter d’interrompre les adultes ca ne se faisait pas, elle devait le comprendre. Mais à l’instant où j’y ai pensé, une scène identique m’est revenue en tête avec une violence inouïe.
➡J’avais 6 ou 7ans. Ma maman venait de revenir d’Europe où elle vivait depuis un an. Elle était partie terminer un doctorat grâce à une bourse. J’étais tellement excitée à l’idée d’avoir ma mère à nouveau avec nous que je voulais rester collée à elle. Je me souviens comme hier de l’émotion intense de bonheur et d’amour que je ressentais. Elle était l’ainée d’une famille de personnes intéressées. Donc eux aussi entendaient bien restés à ses cotés pour présenter leurs doléances et récolter tout ce qu’ils pouvaient. Le second soir de son arrivée, elle était au salon avec sa famille et moi j’arrivais toujours amoureuse de ma mère et je l’interrompais toutes les 2minutes pour lui dire quelque chose. Je voulais parler avec elle je voulais échanger avec elle. A la 3ème ou 4ème interruption, j’ai reçu un gifle d’une violence intense. Je ne sais pas de qui. Je me suis mise à crier, à pleurer. Mon grand-père m’a attrapé par l’oreille pour me dire d’aller dans la chambre et d’y rester avec les autres cousins. Cette scène était d’une violence émotionnelle intense. Ma joie a été éteinte et remplacée par de la peur. La peur de ne plus savoir quand parler, la peur d’exprimer une émotion comme l’amour, la tendresse, la peur d’être rejetée, la peur de ne pas être sage et bien, la peur d’être punie…etc
➡Les jours qui ont suivis j’étais « gentille », je m’asseyais à coté de maman si je voulais être à coté d’elle mais j’avais peur de parler je ne disais plus rien. Je ne demandais plus rien je prenais ce qu’on me donne. Les adultes étaient si fiers de dire que je suis très calme "pas comme d’habitude". Ils étaient contents d’avoir un enfant qui ne parle plus, qui ne dérange plus. Mais j’étais si triste. Je voulais appeler Maman, je voulais qu’elle rigole avec moi. Je voulais parler mais il fallait que je reste là assise à parler quand on me demande de parler, dire ce qu’on veut m’entendre dire.
➡ Par la suite il y a eu d'autres coups, d'autres punitions parce que je ne faisais pas ce qu'on me disait. Ca a eu un impact significatif sur moi et sur ma capacité à exprimer mes émotions.
➡ Ma nièce revenait de vacances et n’avait pas vu son père depuis quelques jours. Elle était tellement contente qu’elle voulait toute son attention. Elle voulait que Papa la traite comme son bébé et lui montre qu’elle lui a manqué aussi. Elle voulait que Papa l’écoute. Et ce n’était pas notre sujet, bien qu’important, qui nécessitait de causer une frustration chez un enfant. Je me suis abstenue de parler et j’ai laissé une petite fille réclamer l’attention de son père.
➡ Je sais que lorsqu’on parle de ces choses chez nous les africains, on pense que ce sont les choses des blancs. Les enfants doivent se taire quand on dit de se taire. Les enfants doivent respecter les conversations des adultes mais en réalité ce sont les adultes qui doivent prêter attention aux enfants. Un enfant ne fait pas la différence entre le parent qui parle avec quelqu'un d'autre. Lorsque l'enfant pense à vous appeler, il n'a pas encore l'âge pour penser que Papa ou Maman est occupé. Lorsque vous le frappez et qu'il arrête ce n'est pas qu'il a compris. C'est juste qu'il a peur. Si générer la peur chez l'enfant pour l'éviter de faire des bêtises peut s'avérer important, générer de la peur pour les choses banales comme s'exprimer est contreproductif.
➡ Beaucoup d'adultes ne savent pas exprimer leurs émotions, ils ne savent pas contrôler leurs émotions, ils ont emmagasiné tellement de colère, tellement de peur, tellement de ressentiment et ils les déversent sur quiconque croisent leur chemin. Ils répètent à tue-tête que les violences qu'ils ont subi ne leur ont rien fait, mais à la seule vue de leurs propres enfants, ils ressentent de la colère, de la distance.
➡ La semaine dernière un certain nombre de nos abonnés m’ont exprimé l’importance du fouet dans l’éducation des enfants sous un de nos posts. Certains ont pris en exemple la jeunesse d’aujourd’hui. Ils disaient « regardez les enfants d’aujourd’hui on a enlevé le fouet et qu’est-ce qu’ils deviennent ». Je leur ai répondu « on a enlevé le fouet et on l’a remplacé par quoi? ». Le fouet et les châtiments ont toujours été utilisés pour soumettre dans l’éducation passée et non pour punir. C’était pour faire peur et amener l’enfant à devenir qui on voulait qu’il soit. Mais si vous poussez un chien à miauler. Il finira par miauler mais il ne sera pas un chat pour autant. Aujourd’hui en enlevant cette obligation de fouet, que font les parents? Les enfants sont prêts à poignarder leurs professeurs et leurs camarades et leurs frères pour un différend. Ils sont tellement en colère, tellement perdus. J’ai partagé la vidéo de cette maman qui traite sa fille « d’ancienne waka » qui veut dire « ancienne bordelle ». Que pensez-vous qu’elle fera lorsqu’une autre personne l’humiliera dehors?
➡L’enfant que vous réprimez pour la petite recherche d’attention qu’il réclame est un potentiel adulte brisé que vous créerez. Bien sûr, il faut de la rigueur dans l’éducation, bien sûr les parents sont aussi à bout parfois ce qui est tout à fait normal mais accordez toujours un espace d’expression de leurs émotions, un espace de communication pour comprendre leur attitude, pour qu’ils comprennent la votre et que vous soyez certain qu’aucune zone d’ombre n’existe où leur imagination va simplement développer ce qu’elle voudra développer et créer le désordre pour les années à venir.