15/05/2025
“On ne répète pas un trauma, on le rejoue pour qu’il prenne fin.”
Voici une lecture psychanalytique de la répétition traumatique. Cela suggère que lorsqu’une personne semble revivre ou répéter une expérience traumatisante, ce n’est pas par simple répétition passive, mais comme une tentative, souvent inconsciente, de résolution.
Dans la théorie freudienne, cette idée rejoint le concept de la compulsion de répétition : l’individu rejoue certaines situations douloureuses dans l’espoir inconscient de pouvoir cette fois les maîtriser ou les comprendre, là où, au moment du trauma initial, il était impuissant.
Ainsi, “rejouer” un trauma serait une mise en scène, parfois symbolique, qui tend vers la fin du cycle, une sorte de quête de réparation.
Prenons l’exemple des relations amoureuses toxiques répétées.
Une femme ayant grandi avec un père distant ou violent entre fréquemment dans des relations avec des partenaires froids, critiques, voire abusifs.
Ce n’est pas qu’elle « aime souffrir », mais plutôt qu’elle rejoue inconsciemment la relation originelle avec l’espoir de changer l’issue : obtenir enfin l’amour, l’attention ou la reconnaissance qu’elle n’a pas eue dans l’enfance. En contrôlant (ou croyant contrôler) la dynamique cette fois-ci, elle cherche une “fin” symbolique à l’histoire originelle.
On peut aussi observer le traumatisme de guerre chez les vétérans
Un ancien soldat revit sans cesse les mêmes scènes de combat, en rêves ou dans des comportements à risque (conduite dangereuse, jeux violents, etc.).
Ces “reprises” peuvent paraître absurdes ou autodestructrices, mais elles servent parfois à réactiver le trauma pour essayer de le contenir, de le comprendre, ou de l’expulser. La psyché cherche à se réapproprier un événement vécu dans un état de sidération.
Autre exemple avec des enfants abusés devenant des adultes maltraitants (ou cherchant des figures d’autorité abusives)
Un enfant battu par ses parents ou ayant subit des violences psychologiques devient parent à son tour et reproduit les mêmes violences.
Ce “rejeu” n’est pas un choix conscient. Il peut exprimer une tentative de rejouer le rôle du dominant cette fois, afin d’échapper au statut de victime. Cela n’excuse rien, mais peut éclairer les mécanismes profonds qui se sont développés.
« Le trauma, c’est ce qui ne peut être raconté. La thérapie, c’est rendre racontable ce qui a figé le temps. »
Le trauma ne se répète pas simplement, il se rejoue, souvent inconsciemment, dans l’espoir d’en trouver une fin différente. Le rôle de la thérapie est d’accompagner cette transformation.
Le cadre thérapeutique est essentiel : un lieu de confiance, sans jugement, où le patient peut commencer à dire l’indicible. Le traumatisé n’a souvent pas de mots pour décrire ce qu’il a vécu, il a besoin d’un espace contenant pour ne pas être submergé à nouveau.
Cela nécessite d’identifier les répétitions afin de comprendre les scénarios qui se rejouent dans la vie actuelle.
Mettre en mots le vécu pour transformer l’expérience brute en récit compréhensible. Un des buts est de changer l’issue du scénario pour imaginer et vivre une autre fin que la douleur ou l’impuissance. Ceci aide à redevenir sujet, ne plus subir, mais choisir et agir en conscience.
La finalité est de passer de la position de victime qui n’est plus prisonnière du passé à celle de sujet capable d’action et de sens. Ce n’est pas oublier. C’est reprendre pouvoir et devenir auteur de sa propre histoire.