01/08/2025
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AgoraPhobie
Grand format 1m/80cm réalisé à la peinture Colorex, crayons de bois carand'ache, et stylo noir Micron, environ 20h de travail
Ce dessin me tient très à cœur car il raconte une histoire, plutôt personnelle, mais qui, je pense, pourra parler à pas mal de monde ayant connu le même souci et les mêmes expériences.
Voilà environ 13 ans que je suis souffre de TOCs de phobie sociale, et particulièrement l'agoraphobie. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'agoraphobie est souvent mal comprise et ne se limite pas seulement à la peur de la foule, ou à "ne pas aimer sortir" comme il est communément pensé.
Elle est bien plus globale, elle étend ses ramifications sur toute les facettes des interactions humaines que l'on peut avoir. Il s’agit d’un trouble anxieux qui peut provoquer une peur intense et de grandes crises d'angoisses dans des situations où l’on redoute de ne pas pouvoir s’échapper facilement ou d’avoir de l’aide en cas de malaise. Cela peut concerner les lieux publics, les transports, les espaces ouverts ou même le fait de quitter son domicile.
Cela peut aussi concerner de simples repas entre amis, le fait d'aller chez la famille ou les potes, le fait de croiser une connaissance dans la rue et discuter simplement. Le fait de devoir aller à un entretient d'embauche, ou dans une salle de classe pour suivre des cours. Cela concerne toute les situations sociales dans lesquelles on aura des interactions. Cela peut aussi s'étendre au delà du physique, ça peut aussi concerner l'idée de l'engagement virtuel comme l'idée de se marier, d'accepter un CDI...
Ce trouble peut être profondément handicapant, car il pousse la personne à éviter de nombreuses situations du quotidien, ce qui peut entraîner un isolement social, une perte d’autonomie, et une souffrance psychologique réelle.
De mon côté, ça a commencé en 2012, j'étais en classe de Première au lycée à ce moment là. J'ai mit des années à comprendre ce qui m'arrivait, mais du jour au lendemain ça s'est déclenché. Des crises d'angoisses monumentales dans le bus, dans la classe. Des nausées des vomissements. La vue qui se troublait et tout le temps l'impression d'être au bord de l'évanouissement. De la sur ventilation, des suées, l'impression que son thorax se compresse comme une bouteille d'eau vide que l'on jette à la poubelle.
Lors de la première année où c'est arrivé, je suis restée environ 5 mois enfermée dans ma chambre sans aller en cours, car j'étais terrifiée à l'idée même d'aller chercher du pain en face de chez moi. Peu à peu, les années passant, j'ai appris ce qu'était l'Agoraphobie, j'ai compris grâce à l'accompagnement de mon psychologue les racines de ce souci chez moi, pourquoi il était là, et comment travailler pour le rendre moins envahissant, pour chaque jour grapiller un peu plus loin en essayant d'agrandir encore de quelques centimètres sa zone de confort afin qu'elle ne soit plus limitée à simplement sa chambre, ou chez soi.
Ce trouble provoquait aussi de la honte chez moi, car je le trouvais parfaitement irrationnel et totalement éloignée de la personne que j'étais, hyper extravertie, très enjouée et adorant passer du temps avec mes potes.
C'est un trouble invisible car beaucoup de personnes, dont je fais partie, font tout pour que la crise d'angoisse ne soit pas remarquée. Pour ma part, beaucoup de mes proches n'ont jamais été au courant. je souffre de ce trouble depuis plus de 13 ans, j'ai toujours essayé de le cacher à beaucoup de monde car je sentais que la pression sociale serait bien plus amplifiée, l'attention des autres bien plus fixée sur moi si je leur avouait mon malaise. J'en ai parlé à d'autres, des proches qui comprenaient et même, beaucoup souffraient du même problème. Ces personnes m'ont énormément aidé dans ma vie, elles se reconnaîtront en lisant ces lignes.
J'ai pris l'habitude, comme pour énormément d'autres personnes qui souffrent de ce trouble, de porter un masque, de me cacher derrière une façade. Celle d'une personne très enjouée, très souriante, bavarde et presque extravertie. Je suis cette personne dans mon quotidien, ce n'est pas un masque éloigné de ma propre personnalité, en revanche en cas de crise d'angoisses ou d'anxiété liée à l'agoraphobie, j'amplifie ces facettes de ma personnalité pour me cacher. Je suis cependant devenue beaucoup plus sage, plus introvertie, plus procédurière avec le temps. Je pense que c'est un peu dût à l'âge, à mon métier, et à ce trouble en partie. C'est une personnalitée qui ne me dérange pas, elle est simplement un peu différente.
L'angoisse est amplifiée chez moi par la peur de la perte de contrôle. Peur de la perte de contrôle de moi même, mais aussi de ce que les autres peuvent penser de moi, comment il ressentent mes interactions, comment ils me voient. Et c'est là que l'on entre au cœur du problème. Cette anxiété pousse à son paroxysme la peur du regard de l'autre. On déforme notre vision de l'autre, on l'anticipe, on l'appréhende, on la craint. Même si c'est une personne qui ne se doute de rien et qui nous aime.
J'ai hésité pendant pas mal de jours avant de me décider à écrire le pourquoi du comment de se dessin, au début je ne voulais surtout pas que mon texte soit perçu comme de l'auto-victimisation, je veux que vous compreniez que je ne souhaite pas écrire ce texte pour me plaindre ou attiser la sympathie ou même de la pitié. Je ne souhaite pas que votre opinion ou votre vision de moi change. Je parle de ce sujet aujourd’hui parce que, si l’agoraphobie est difficile à vivre pour la personne qui en souffre, elle est aussi souvent déconcertante pour l’entourage. Comprendre, c’est déjà aider. En ayant des connaissances de base sur ce trouble, on peut apprendre à mieux soutenir un proche, sans jugement, avec patience et bienveillance.
A présent je vais parler du dessin ( c'est bien pour ça que l'on est là hein !! )
J'ai voulu symboliser l'angoisse par un amas de racines et d'éléments organiques, ainsi qu'un visage hurlant, le tout collé, enfermé, aglutiné. L'angoisse est comme une grosse pâte informe et collée à son cerveau, on a du mal à l'arracher une fois qu'elle est installée. Le visage lisse et doux de la femme symbolise l'image extérieur, le masque que l'on porte pour essayer de se cacher de son angoisse, de se donner une image conforme face aux autres. Les mains bleues symbolisent l'Autre. Les interractions. Et surtout l''impact que la peur du regard des autres a sur nous, elle nous enferme dans nos troubles, et finit par matérialiser notre vision du Réel et de la Vie.
A présent, je dirais que depuis plus de 3,4 ans, je suis fière de pouvoir dire que j'ai fait beaucoup de progrès. Je me sens infiniment mieux depuis que je suis une TCC ( Thérapie cognitive et comportementale ) pour soigner mes TOCS, car pour ma part il est surtout question d'une pluralité de TOCs de phobie sociale ( attention, ce n'est pas valable pour toutes les personnes qui souffrent d'Agoraphobie )
Le schéma des TOCs, les compulsions, les vérifications, tout cela serait beaucoup trop long à expliquer ici, mais si vous en souffrez, ou pensez en souffrir, n'hésitez pas à venir échanger de tout cela avec moi, je trouve qu'il est très important de faire de la lumière sur ces problèmes qui peuvent littéralement pourrir la vie quand l'on en souffre mais que l'on ne les connaît pas vraiment.
De mon côté, ces dernières années, j'ai réussi à prendre l'avion ! 12 heures allé 12 heures retour il y a deux ans ! Pour moi c'était tout bonnement impensable d'y songer il y a 4 ans ! J'ai réussi à passer mon permis avec toutes les heures de conduite accompagnée que ça a demandé ! J'ai réussi à ouvrir mon salon privé de Tatouage, dans lequel je n'ai quasiment plus ressenti d'angoisse depuis des années, je me sens très à l'aise dans mon univers avec mes tatoués, car je sais aussi que c'est un endroit dans lequel je suis en contrôle, et que le fait de Tatouer est la chose que j'aime le plus au monde.
J'arrive sans problème à aller voir des amis, à faire des grosses bouffe, à prendre le train. Et même si parfois j'ai encore des pointes d'anxiété, je ne me sens plus du tout la tête sous l'eau comme ça a été le cas pendant de nombreuses années... Je me sens enfin vivre le moment présent, et profiter des personnes que je vois quand je les vois, au lieu de me focaliser sur mes ressentis intérieurs et la peur de ce qu'ils penseraient de moi. Je vis enfin des moment qualitatifs avec les autres humains, et je remercie la Vie pour ça !
Merci d'avoir lu jusqu'au bout c'est adorable de votre part !
Et si vous en souffrez aussi, ne vous inquiétez pas, vous n'êtes pas seul, et surtout sachez que rien n'est définitif, cela ne vous définit en rien ! Et surtout il est possible d'en sortir !!
