02/04/2022
Psychologues du DUNKERQUOIS
Information à destination des professionnels de santé, usagers, CPAM, ARS, CPTS
Notre profession est au fil des évènements que vit notre société de plus en plus sur l’avant de la scène (attentats, catastrophes naturelles, COVID, conflits internationaux, etc), parallèlement à tous les accompagnements et prises en charge effectués dans le cadre des mal-être et pathologies de la santé mentale qui représentent une part croissante et MAJEURE des problématiques rencontrées dans la population. Bien que consensus soit fait sur la nécessité de proposer et améliorer le système de santé, et notamment l’offre de soins en santé mentale, les psychologues restent une profession malconnue ou méconnue et surtout délaissées par les pouvoirs publics.
Suite à la pandémie, nous avons été informés comme vous dans les médias d’une prise en charge intégrale des consultations chez un psychologue pour l’année 2022. Nous réclamons cela depuis des années pour nos patients. Passé la joie de l’annonce, et dans l’attente d’être enfin sollicités pour en penser les contours, nous avons malheureusement pris connaissance -sans concertation- des décisions prises par le ministère sur le fameux Dispositif MonPsy, qui a déçu l’ensemble des acteurs de terrain, syndicat et surtout nos patients.
Nous souhaitions donc vous avertir et informer au sujet de ce dispositif annoncé mais non applicable (cf esquisse des différentes sources d’insatisfaction et incohérences quant au dispositif, ci-dessous) et de notre intention collégiale de ne pas y adhérer comme grand nombre d’autres psychologues. Sachez que seuls les psychologues volontaires et figurant sur le site du ministère dans la rubrique dispositif MonPsy, ont accepté ces conditions, et peuvent donc être prescrits/remboursés par la sécurité sociale.
Bien sur les CMP et autres structures de soins publiques/associations poursuivent leurs actions d’accès direct et pris en charge des consultations psychologiques, bien que non renforcées par le gouvernement depuis des années. Et enfin, nous poursuivrons notre pratique en toute éthique, et bienveillance pour le patient et pour nous même. Nous espérons que le dispositif évoluera pour une véritable proposition de santé et enrichissement de l’offre de soins. En attendant une démarche en ce sens du gouvernement, vous pouvez tout à fait poursuivre vos orientations de patients, et liaison avec chacun d’entre nous pour proposer l’accompagnement que votre patient mérite. Les consultations restent éligibles au remboursement des complémentaires santé selon les garanties prévues dans leur contrat.
Nos sincères salutations,
Cosignataires – Psychologue du Dunkerquois: Albatre Camille, Cousyn Constance, Vandevelde Emilie, Ardaen F***y, Chaudron Sarah, Dezoutter Amandine, Reynaert Anthony, Tastevin Monique, Vandenberghe Virginie, Verschaeve Tatiana
Les sources d’insatisfactions/incohérences sont nombreuses :
- Le patient n’est plus acteur/au centre de sa démarche de soin, impossibilité de recourir au psychologue lorsqu’il en ressent le besoin sans avoir une « validation médicale ».
- Non respect des recommandations de bonnes pratiques. Le nombre de séances limitées en temps, en nombre, va à l’encontre de toutes études, toutes prises en charge éthique, déontologique et scientifique.
- Accès très réduit par les critères d’exclusion. Le médecin prescripteur devra faire passer un ensemble d’échelles (dépression, anxiété, trouble d’usage, etc) et vérifier l’ « éligibilité » en fonction du score obtenu, vérifier l’absence de contre-indication (arrêt maladie pour raison psychologique dans les 6 mois, pas de traitement type anxiolytique/antidépresseur dans les 6 derniers mois, pas d’hospitalisation ou suivi psychiatrique, etc). Ainsi au-delà du temps considérable demandé au médecin (qui devra en plus faire une lettre d’orientation pour rappeler tout ces éléments et prescrire un bilan, recevoir le bilan, revoir le patient et prescrire les 7 séances maximum de suivi, etc)… Le patient s’en retrouve exclu, son besoin nié et refoulé, n’ayant de ce fait, pas accès au remboursement.
Le budget attribué pour le lancement du dispositif donne un rationnement et accès au dispositif pour 0,5% de la population (indépendamment des critères d’exclusion) et seul 1000 psychologues volontaires « acceptés » sur l’ensemble du territoire Français. Ainsi, malgré l’éligibilité aux critères du dispositif, avoir l’aval du médecin prescripteur, il va falloir pour votre patient trouver un psychologue volontaire dans sa région pour ces quelques séances, puis un arrêt brutal ds soins ou reprendre à 0 avec un suivi en CMP (temps d'attente+++) car non renouvellable ( ou refaire toutes les démarches l'année suivante).
- Charge administrative considérable, par la feuille de soin systématique, contrôle par la CPAM des courriers d’adressage, des critères d’inclusions/exclusions. Ainsi, un psychologue peut se retrouver à ne pas être rémunéré du travail effectué pour rature, problème de date, ou outre passage des critères par le médecin prescripteur.
- Non respect de la confidentialité par la nécessité d’effectuer des comptes rendus SYSTEMATIQUES de la première et dernière séance. Premièrement nos patients sont largement réticents à cela, et lorsque nous en évaluons la nécessité, nous travaillons la démarche avec le patient pour parvenir à cette relation avec l’équipe de soins (MG, services de psychiatrie, sage-femme, médecins spécialistes, etc..) qui va dans le sens d’un accompagnement personnalisé, articulé et pertinent pour le patient.
- Rémunération absolument inapplicable qui entraine une réduction au tiers le temps passé avec le patient. Celle décidée par le ministère ne repose sur aucune étude de terrain et aucune prise en compte des charges de l’activité libérale
(22,2% URSSAF, le loyer, l'électricité, le temps de secrétariat et compta, logiciel de gestion ou de prise de rendez vous, congés payés, assurance pro, compte pro bancaire, impôts, CFE, prévoyance maladie/congés maternité, retraite, formations, forfait téléphonique/internet. La transparence et l'explication permets de mieux saisir la réalité de terrain. Ainsi, 60% de notre chiffre d’affaire partent dans ces charges.) Une consultation chez un psychologue dure entre 45 min et 1h en général, voir 1h30 pour des thérapies spécialisées. Ainsi à 30 € brut de l’heure, il s’agit là de pratiquer notre profession en libéral pour 11 € net de l’heure, ce qui est bien sûr inacceptable, encore moins avec responsabilité et un niveau d’études BAC+5.
- Du fait de la réduction de temps de consultation, les techniques psychothérapeutiques ne peuvent être employées..aucune. Il s’agira donc d’entretien de 20 minutes maximum comprenant la rédaction du compte rendu, le règlement/facturation, et l’établissement d’une feuille de soin. Il s’agira maximum de 10-12 minutes de temps d’écoute et non de prise en charge psychologique/psychothérapeutique.
Les patients méritent une prise en charge psychologique et non un pseudo dispositif maltraitant et sommes force de proposition pour des avancées nécessaires et urgences de l’accès aux soins, et de l’offre de soins. Nous refusons de participer à ce dispositif.
Pour information, cette décision est soutenue et partagée par des milliers de psychologues sur l'ensemble du territoire (Convergence des psychologues en lutte, Syndicat National des Psychologues, ManifestePsy, etc).
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Constance COUSYN
Psychologue Clinicienne