08/07/2025
L’impact des organophosphorés sur le développement neurocognitif des enfants
À retenir :
À partir de la cohorte mère-enfant ELFE, une étude française a exploré l’association entre l’exposition prénatale et durant la petite enfance aux esters organophosphorés (EOP) et le développement cognitif non verbal des enfants à l’âge de 3,5 ans.
Les résultats montrent qu’une exposition élevée au tri-n-butyl phosphate (TBP) in utero ainsi qu’à l’éthyl diphényl phosphate (EHDPP) et au triphénylphosphate (TPHP) durant la petite enfance est associée à des performances cognitives réduites chez le jeune enfant.
Le fond du problème :
Étant donné le caractère ubiquitaire de ces polluants, les auteurs appellent à la mise en place rapide d’études robustes pour évaluer le risque sur le neurodéveloppement de l’enfant et la cognition.
Les esters organophosphorés (EOP) sont des composés chimiques présents dans les ret**dateurs de flamme bromés ou les plastifiants. Ils sont largement utilisés dans la production des voitures, les produits électroniques, les textiles… si bien que ces polluants persistants se retrouvent parfois à des concentrations non négligeables dans l’environnement, la chaîne alimentaire et jusque dans l’intérieur des maisons. Plusieurs études ont suggéré qu’une exposition prénatale aux EOP pourrait avoir un effet délétère sur le développement neurocognitif de l’enfant (langage, motricité fine, fonctions exécutives…) au cours des 2 premières années, puis plus t**d, sur les capacités intellectuelles. Les ret**dateurs de flamme bromés ont même fait l’objet d’une surveillance en France et les niveaux d’imprégnation en population française ont été mesurés. Pour explorer la toxicité des EOP sur le développement neurocognitif des enfants, des chercheurs français ont étudié l’association entre l’exposition à différentes molécules de cette famille avant la naissance et la cognition des enfants à 3,5 ans.
À partir de la cohorte nationale française ELFE, 881 couples mères-enfant ont pu être inclus dans l’étude.
Le niveau d’imprégnation des mères à la naissance (reflétant l’exposition in utero), et des enfants à 3 ans et demi a été mesuré à partir d’échantillons de cheveux pour 9 organophosphorés différents, notamment les polybromodiphényléthers qui appartiennent aux ret**dateurs de flamme bromés. Les fonctions cognitives non verbales des enfants ont ensuite été évaluées à l’âge de 3 ans et demi par le test Picture Similarities du British Ability Scales (PST).
Parmi les EOP recherchés, 5 étaient présents dans plus de 90 % des échantillons maternels à la naissance et 3 ont été retrouvés chez plus de 90 % des enfants à 3 ans et demi. Les concentrations médianes les plus importantes concernaient le TCPP (tris[2-chloropropyl] phosphate) chez les mères comme chez les enfants (265 et 246 ng/g respectivement).
L’exposition aux organophosphorés associée à une altération des capacités cognitives chez le jeune enfant
Aucune association statistiquement significative n’a pu être établie entre le niveau d’exposition globale aux EOP in utero et le score PST des enfants à 3,5 ans. Cependant, les enfants des mères qui appartenaient au quartile le plus exposé au tri-n-butyl phosphate (TBP) avaient un score significativement réduit de 4,5 points au PST par rapport à ceux dont les mères appartenaient au quartile le moins exposé (correspondant à une baisse de 5 % environ). En outre, la détection de tris(2-butoxyethyl) phosphate (TBEP) chez les mères à la naissance de leur enfant a pu être associée à une baisse de 7,4 points du PST chez les enfants 3,5 ans plus t**d, après ajustement sur les différents facteurs confondants.
L’exposition à des concentrations élevées durant la petite enfance réduisait les capacités cognitives à 3,5 ans : de 2,5 % chaque fois que l’exposition en éthyl diphényl phosphate (EHDPP) était doublée et de -10 % environ pour les enfants exposés aux concentrations les plus élevées en triphénylphosphate (TPHP).
D'après Univadis
Agnès Lara | Publié 2 juil. 2025