12/10/2025
Suite à la déclaration de la société Medela, qui s’est présentée comme “conforme au Code de commercialisation des substituts du lait maternel”.
Ce texte à été partagé avec la publication de L'IBFAN
Je cite
"Pour informations voici un texte de déclaration de IBFAN.
Le fabricant de tire-lait Medela a contacté des organisations de soutien à l’allaitement dans le monde entier pour leur annoncer qu’il avait cessé de produire et de vendre des sucettes/tétines depuis novembre 2024, et qu’il avait interrompu la vente de biberons et de tétines d’alimentation en juillet 2025.
Medela affirme désormais être « conforme au Code » et s’attend clairement à être reconnue comme un partenaire et un sponsor inoffensif.
Bien qu’IBFAN prenne note de ce changement de politique, nous invitons tous nos partenaires à faire preuve de prudence avant d’envisager toute relation avec Medela ou ses fondations.
IBFAN soulève d’importantes préoccupations concernant les partenariats avec les fabricants de tire-lait, y compris Medela, ainsi que leurs fondations. Pour en savoir plus : https://www.ibfan.org/ibfan-statement-medela-pump-companies-and-foundations/?fbclid=IwZXh0bgNhZW0CMTAAAR4fEnArY_C1xP3f46BpsR5z5sOXgI_pe94WthmM1wzq2bzkQjfAfcUtEELGKA_aem_8fL5ctuxflBzZ4RyKZAE6w IBFAN – Depuis 1979, nous protégeons l’allaitement. Ci-dessous, quelques raisons pour le concerne autour de Medela, les fondations dont ils se servent pour promouvoir leurs propres intérêts et les intérêts des autres fabricants de tire-lait (et leurs accessoires).
1. Medela est une entreprise à but lucratif basée en Suisse, qui fait la promotion de ses produits de manière très active. Medela a été fondée en 1961 par Olle Larsson et est aujourd’hui dirigée par son fils Michael Larsson.
La Fondation Family Larsson-Rosenquist (FLRF) a été créée en 2013.
Medela Holding AG est la société mère du groupe Medela, qui se concentre sur deux domaines : l’allaitement maternel et les soins de santé, et qui compte 18 filiales employant plus de 1 500 personnes dans le monde.
2. Medela est-elle “conforme au Code” ?
Non, et cela pour plusieurs raisons.
Premièrement, le terme “Code compliant” (« conforme au Code ») est un terme vide de sens, autoattribué, qu’aucun fabricant commercial de produits destinés à l’alimentation des nourrissons ne peut ni ne devrait revendiquer.
En l’absence d’un suivi indépendant et permanent à l’échelle mondiale, il est impossible de garantir qu’une publicité, un représentant commercial, un médecin parrainé ou un influenceur ne convainc pas une mère quelque part qu’un produit résoudra ses difficultés d’allaitement.
Ni l’OMS ni l’UNICEF n’ont mis en place de mécanisme permettant d’accréditer une entreprise comme étant conforme au Code. Tous les outils existants servent à surveiller les violations, non à certifier la conformité.
Deuxièmement, bien que le Code ne s’applique pas spécifiquement aux tire-laits, la promotion de tout produit destiné à nourrir les bébés – en particulier un produit qui modifie fondamentalement la relation d’allaitement – peut compromettre l’allaitement et enfreindre l’article 1 du Code, dont l’objectif est de protéger l’allaitement.
Troisièmement, Medela continue de produire des produits entrant dans le champ d’application du Code.
Les biberons Medela sont désormais renommés « contenants pour lait maternel », mais deviennent des biberons dès lors qu’on y ajoute une tétine et un anneau.
Medela continue également de fabriquer et vendre des « dispositifs d’alimentation pour besoins spécifiques » – un type de biberon qui, dans certains pays, est soumis à la législation nationale basée sur le Code.
3. Quel est le problème avec la promotion des tire-laits ?
IBFAN reconnaît que de nombreuses personnes trouvent les tire-laits utiles, notamment lorsque le congé maternité est très court.
Les tire-laits peuvent aussi avoir une fonction thérapeutique, par exemple pour aider les mères à fournir leur lait à des nourrissons prématurés hospitalisés en néonatologie et séparés d’elles.
Cependant, IBFAN s’inquiète du fait que la promotion commerciale des tire-laits puisse nuire à la relation d’allaitement directe et à la pratique de l’expression manuelle du lait.
Pour générer les profits attendus par leurs propriétaires et actionnaires, les fabricants de tire-laits promeuvent largement leurs produits auprès du secteur de la santé, du grand public et des parents, souvent sans que ceux-ci sachent qu’ils ont besoin d’un accompagnement personnalisé pour les utiliser correctement.
Une mauvaise utilisation des tire-laits peut endommager le tissu mammaire et provoquer engorgement et mastite.
Il convient de noter que les effets indésirables liés aux tire-laits sont sous-déclarés auprès de la FDA.
La dépendance financière à l’égard des fabricants (parrainage de conférences, formations, matériel professionnel) crée des conflits d’intérêts et fragilise les cultures traditionnelles d’allaitement et la maîtrise de l’expression manuelle.
Cela peut entraîner une hausse du recours au biberon, une diminution de l’allaitement, une augmentation des risques sanitaires dans les pays du Sud et une charge financière inutile pour les familles à faibles revenus.
4. Donner du lait maternel au biberon n’est pas équivalent à l’allaitement.
“Le contact peau à peau soutient les mécanismes de maturation, notamment le contrôle de la température, le métabolisme et l’adaptation circadienne.
Le lait maternel exprimé dans un biberon reste supérieur aux préparations commerciales, mais l’allaitement direct est associé à des taux plus faibles d’asthme, à une plus forte présence de Bifidobacterium bénéfique et à une meilleure auto-régulation de l’apport énergétique du nourrisson, protégeant ainsi contre l’obésité.”
— The Lancet Breastfeeding Series, 2023.
La promotion non ciblée des tire-laits banalise leur utilisation, et aux États-Unis, l’allaitement (nursing) est progressivement redéfini comme « nourrir au lait maternel ».
• Il existe des différences fondamentales entre le lait consommé au sein et le lait exprimé. L’allaitement est une interaction humaine spécifique, adaptée à chaque bébé, fondée sur la réactivité individuelle entre la mère et l’enfant.
• Les recherches montrent que lorsque le bébé tète directement, sa salive interagit avec le lait maternel et le système immunitaire de la mère, envoyant des signaux à son cerveau sur les besoins précis de l’enfant. Cette communication unique assure une nutrition personnalisée et des anticorps adaptés favorisant croissance, développement et protection contre les maladies.
• Le lait maternel change de composition selon l’âge, le sexe du bébé, le moment de la journée et même au cours d’une même tétée.
• L’allaitement est un contraceptif naturel, connu sous le nom de méthode MAMA (aménorrhée lactationnelle). La suppression hormonale de l’ovulation n’a été étudiée que dans le cas d’un allaitement exclusif et fréquent. Selon l’OMS, le risque de grossesse avec cette méthode est inférieur à 1 % pendant les six premiers mois.
5. Quels sont les risques de collaborer avec les fabricants de tire-laits et leurs fondations ?
Premièrement : Medela et les fabricants de produits pour bébés comprennent très bien le pouvoir de l’association.
Grâce à des fondations comme la FLRF, ces entreprises cherchent à établir des alliances stratégiques avec IBFAN, des professionnels de santé, des chercheurs, des institutions et des groupes de soutien à l’allaitement, prétendant que ces collaborations amélioreront les taux d’allaitement.
En réalité, leur objectif principal reste d’accroître leur clientèle potentielle, ce qui est l’essence même de toute entreprise à but lucratif.
Deuxièmement : les partenariats public-privé mènent inévitablement à une gouvernance partagée, permettant à des entités commerciales, sans responsabilité démocratique, de siéger à la table des décisions de santé publique et d’influencer les politiques à leur avantage.
Troisièmement : le financement et le parrainage de la recherche, des associations professionnelles et du matériel de formation par des entreprises à but lucratif constituent des formes de marketing.
Pour IBFAN, s’associer à Medela ou à d’autres fabricants de tire-laits (ou à leurs fondations) créerait un conflit d’intérêts inacceptable.
6. Les tire-laits sont difficiles à nettoyer et inadaptés en contexte d’urgence humanitaire.
La donation ou la distribution non contrôlée de tire-laits et d’équipements connexes est interdite par les Directives opérationnelles sur l’alimentation du nourrisson en situation d’urgence (OG-IFE) v3.0, 2017.
7. L’impact environnemental.
Les dispositifs et produits d’alimentation des nourrissons, ainsi que leurs emballages, présentent des risques inhérents.
Les plastiques et les perturbateurs endocriniens augmentent la charge chimique chez les bébés et jeunes enfants, affectant négativement leur système immunitaire, reproductif et hormonal.
Comme tout produit industriel, la fabrication des tire-laits laisse une empreinte carbone contribuant au changement climatique.
Ces problèmes, ainsi que les déchets plastiques et chimiques, s’aggravent lorsque ces produits sont promus sans réelle nécessité.
8. Conclusion
IBFAN comprend les difficultés de financement rencontrées par ses partenaires nationaux et internationaux, qui œuvrent tant à soutenir et protéger les mères allaitantes.
Cette note a été préparée en réponse à de nombreuses demandes de clarification de la position d’IBFAN.
Conformément à sa politique de financement, IBFAN ne sollicite ni n’accepte de fonds, dons, cadeaux ou parrainages provenant de fabricants ou distributeurs (ou de leurs fondations) de produits liés à l’alimentation des nourrissons et des jeunes enfants.
Les groupes IBFAN sont également encouragés à ne pas accepter de financement d’autres entreprises à but lucratif.
La question de la participation à des conférences ou événements parrainés en tout ou partie par des entreprises ayant un intérêt commercial dans l’alimentation des nourrissons est complexe et expliquée dans nos Directives 2006 sur la participation des groupes IBFAN à ce type d’événements."
Cependant, il m’a semblé nécessaire de souligner que cet article, bien qu’essentiel dans son message de fond, prend une tournure à charge envers le tirage de lait (tire allaitement occasionnel ou exclusif) , au risque d’en atténuer la portée et la légitimité.
Je ne cherche pas particulièrement à obtenir du soutien, j’ai l’habitude de mener mes batailles seule.
Mais je réalise de plus en plus que les appuis collectifs permettent parfois d’affiner les messages essentiels, avec la nuance et la clarté qu’ils méritent. C'est pourquoi je vous le partage avec transparence. Car il me semble important d'être engagée pour un accompagnement de l’allaitement qui reste éthique, libre de tout conflit d’intérêt et solidement appuyé sur les données scientifiques.
Un mail à été envoyé à Patti Rundall
Plaidoyer mondial, IBFAN, Royaume-Uni
J'ai également écris sous le partage de leur annonce Facebook
https://www.facebook.com/share/p/1D34eZ84N7/
Je vous écris la traduction de mon message :
Je partage votre vigilance quant aux risques de conflits d’intérêts et à l’importance de préserver l’intégrité du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel.
Cependant, certaines formulations du texte pourraient être comprises comme une remise en cause du principe même du tirage de lait, indépendamment des contextes cliniques. Or, les recherches récentes sur la physiologie immunitaire du lait maternel et la dynamique des tissus mammaires apportent des nuances importantes.
Plusieurs travaux (Ramsay 2004 ; Hassiotou 2013 ; Brandtzaeg 2011 ; Rodríguez 2020 ; Boix-Amorós 2016) confirment notamment que :
– le lait exprimé conserve une richesse immunologique issue de l’activation des systèmes BALT, GALT et MALT ;
– la translocation bactérienne via la voie entéro-mammaire assure la présence de bactéries bénéfiques indépendamment du mode d’expression ;
– l’absence de flux rétrograde ne modifie pas la qualité immunitaire du lait mais uniquement certains mécanismes de rétro-signalisation entre salive et lait ;
– le tirage, lorsqu’il est pratiqué avec accompagnement et indication adaptée, soutient la continuité de la lactation et l’alimentation lactée dans des contextes de prématurité, séparation, relactation ou reprise de travail.
Il me semble donc essentiel de distinguer la critique légitime du marketing commercial d’une réflexion physiologique plus large sur la diversité des pratiques lactées.
La protection du Code et la reconnaissance des usages cliniquement justifiés du tirage ne sont pas contradictoires : elles participent d’un même objectif de santé publique.
Je vous remercie pour votre travail constant de vigilance et reste disponible pour échanger ou partager les extraits bibliographiques détaillés qui soutiennent ces observations.
Respectueusement,
Annexe scientifique :éléments de référence
Ramsay DT, Kent JC, Hartmann RA, Hartmann PE. Anatomy of the lactating human breast redefined with ultrasound imaging. Exp Physiol. 2004;89(3):275–282. doi:10.1113/expphysiol.2003.026641
Hassiotou F, Hepworth AR, Metzger P, Tat Lai C, Trengove N, Hartmann PE, Filgueira L. Maternal and infant infections stimulate a rapid leukocyte response in breastmilk. PLoS ONE. 2013;8(6):e67775. doi:10.1371/journal.pone.0067775
Brandtzaeg P. The mucosal immune system and its integration with the mammary glands. Ann N Y Acad Sci. 2011;1238:13–25. doi:10.1111/j.1749-6632.2011.06268.x
Field CJ, German JB, Van’t Land B. The immunological components of human milk and their effect on infant health. J Nutr. 2002;132(6):1801S–1814S. doi:10.1093/jn/132.6.1801S
Rodríguez JM, et al. The origin of human milk microbiota: is there a bacterial entero-mammary pathway during late pregnancy and lactation? Front Microbiol. 2020;11:497. doi:10.3389/fmicb.2020.00497
Boix-Amorós A, Martinez-Costa C, Querol A, Collado MC, Mira A. Multiple approaches detect the presence of bacteria in human breastmilk. Cell Mol Life Sci. 2016;73(22):4475–4485. doi:10.1007/s00018-016-2288-1
Prime DK, Geddes DT, Spatz DL, Robert M, Trengove NJ, Hartmann PE. Using milk flow rate to investigate milk ejection in women expressing breast milk. J Hum Lact. 2011;27(2):136–143. doi:10.1177/0890334410390044
Kent JC, Prime DK, Garbin CP. Principles for maintaining or increasing milk production. J Obstet Gynecol Neonatal Nurs. 2012;41(1):114–121. doi:10.1111/j.1552-6909.2011.01313.x
The breast pump manufacturer, Medela, has been contacting breastfeeding support organisations around the world saying that they have stopped producing and selling dummies/pacifiers since November 2024 and that they discontinued the sale of feeding bottles and teats in July 2025. Medela claims that they are now “Code compliant” and clearly expects to be accepted as a benign sponsor and partner. While IBFAN notes this policy change, we urge all our partners to be cautious before considering any relationship with Medela and its foundations.
IBFAN raises important concerns about partnerships with breast pump manufacturers, including Medela, and their foundations.
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