11/02/2021
Mercredi dernier, réunion en Visio avec les bénévoles de la ville de Mérignac. Leurs interrogations concernaient l'impact de la situation sanitaire sur les aînés. Voilà un petit résumé de ce que j'ai pu aborder avec eux.
Ce qu'il faut savoir c'est que les problématiques des plus de 65 ans, les fameuses "personnes à risque", sont bien différentes selon qu'on se situe autour de 65 à 75 ans, ou plutôt entre 80 et 90 ans, voire plus.
A partir de 65 ans, ce sont les statuts sociaux, professionnels et familiaux qui sont chamboulés, parfois complètement mis de côté par une intrication d'événements personnels mais aussi sociétal. Les enfants qui habitent loin donc pas de petit enfants à garder, un éventuel veuvage. Le regard des actifs sur les retraités "tu pourrai pas faire tes courses à un autre moment non ?", "ils ont la belle vie, nous on n'aura pas de retraite"...j'en passe et des meilleurs. J'en profite pour signaler qu'il est possible que si un jour à 70 ans vous n'avez plus personne à qui parler dans vos journées, vous aussi, vous risquez de faire vos courses aux heures de pointe :)
Et sans parler du tout numérique qui largue un bon nombre de personnes de +70 ans, bien que cela tende à s'améliorer à mesure que le temps passe.
Chez les plus de 80/85 ans, on est dans une autre dynamique. L'élan vital est parfois terni par les années, les deuils, les obstacles de toute une vie, et les perspectives sont plus que limitées. Comment investir une vie qui ne se compte plus qu'en mois voire en quelques petites années ? Pas si évident, surtout sur ces générations, habituées à être avant tout des travailleurs, des époux et des parents. Développement et épanouissement personnel ? Connaissent pas ça eux.
Donc vous l'aurez compris si les éléments de vulnérabilité de nos plus de 65 ans sont : isolement familial, social, pertes de perspectives d'avenir...il est évident que les confinements, les gestes barrières et les restrictions vont impacter durement cette partie de la population.
Alors voici ce que j'ai observé depuis un an :
- une augmentation des troubles anxieux de type agoraphobie mais également la peur d'être seul, de ne plus être soigné. Il est intéressant de noter que certaines personnes qui exprimaient un désintérêt de la vie et n'attendaient plus que la mort, ont été très inquiet à l'idée de mourir de la covid. Se rappeler qu'on est mortel n'est finalement jamais très agréable.
- une augmentation des troubles dépressifs, principalement chez ceux qui en souffraient déjà.
- une augmentation des troubles du comportement de type apathie et agressivité.
- une augmentation des troubles cognitifs.
Et puis il y a les résilients, ceux dont l'inquiétude est tournée vers la jeunesse, qui s'inquiètent véritablement de cet avenir encombré. Ceux là, passé l'étape de sidération du premier confinement, ont réussi à trouver des ressources et à s'adapter à ces changements. La catégorie dans laquelle ils ont été enfermés a été éprouvante. On surveille leur cholestérol, le risque de chute, d'hypertension, on leur donne des compléments alimentaires hyperprotéinés, on surveille les analyses de sang, d'urine...on supprime tout risque de mourir. Cette fois-ci encore, on supprime le risque, sans vraiment leur demander leurs avis, sans vraiment s'intéresser à ce que c'est VIVRE pour eux.
On a conclu cet échange autour de ce concept étrange qu'est l'humanité. De la spécificité de notre espèce, de nos besoins d'ETRE en relation, et non pas toujours de FAIRE ou d'AVOIR. En ce sens, la mission du bénévole à domicile prend toute sa valeur. Ils s'inquiétaient de ne pouvoir apporter des solutions aux personnes qu'ils visitent. Mais ce n'est pas ce qui leur est demandé. Nous avons fini par tomber d'accord sur la nécessité de ne plus rechercher la productivité, même dans nos échanges sociaux. Et qu'être ensemble, avec bienveillance et un intérêt sincère pour l'autre, était finalement, notre vérité à tous ce soir là.
