11/06/2025
Pourquoi avons-nous tant de mal à nous engager ?
Par Valérie Grumelin
Il fut un temps où l’engagement allait de soi. On s’engageait pour la vie, dans un métier, une relation, une idée, une terre. Aujourd’hui, tout semble réversible, conditionnel, temporaire. Les promesses sont suspendues à des « si », les relations à des applications, les projets à une peur sourde de perdre, d’échouer, ou simplement d’être liés. Pourquoi notre époque, si riche en opportunités, est-elle aussi pauvre en engagements véritables ?
L’engagement : un risque devenu insupportable ?
S’engager, c’est se lier. C’est dire oui, malgré l’incertitude. Or, nous vivons dans une société obsédée par le contrôle, la maîtrise, la garantie de résultats. Nous voulons aimer sans souffrir, investir sans perdre, entreprendre sans douter. Mais cela n’existe pas. Tout engagement implique un risque. En refusant le risque, nous refusons la vie dans sa vérité.
L’illusion de l’illimité
Jamais l’être humain n’a eu autant de choix. Partout, on nous vend l’idée que « tout est possible », « rien n’est définitif », « on peut toujours changer ». Ce discours flatteur produit en réalité une angoisse : comment choisir, quand tout semble provisoire ? Alors, on repousse, on zappe, on reste dans l’entre-deux. On attend d’être sûr. Mais on ne l’est jamais.
La peur d’être déçu… ou d’être décevant
L’engagement suppose de croire. Croire en l’autre, en une cause, en soi. Or, cette croyance est fragilisée. Nous avons été blessés, désillusionnés, trahis parfois. Et puis, dans une société où tout est comparé, évalué, critiqué, s’engager c’est aussi se mettre en jeu. Et si je ne suis pas à la hauteur ? Et si je fais le mauvais choix ? Alors, on préfère rester en surface, sans s’impliquer. On croit se protéger. En réalité, on s’éteint.
L’amour liquide, l’engagement fragile
Dans les relations aussi, l’engagement vacille. On multiplie les connexions mais on redoute la véritable rencontre. On veut la passion sans les contraintes, l’intimité sans la dépendance. L’amour devient un marché, et chacun redoute de perdre sa « liberté ». Mais sans lien, sans choix assumé, la liberté devient solitude.
Revaloriser l’engagement : un acte de résistance
S’engager aujourd’hui, c’est aller à contre-courant. C’est choisir de dire oui dans un monde du « peut-être ». C’est accepter de perdre pour pouvoir gagner quelque chose de vrai. Un amour profond, un projet qui compte, une cause qui dépasse l’égo. L’engagement n’est pas une chaîne, c’est une force. Celle de ceux qui veulent bâtir, pas seulement consommer.
Conclusion : L’engagement, une forme de foi
Dans un monde saturé d’options, l’engagement est un acte de foi. Il ne garantit rien, mais il ouvre des possibles. C’est en s’engageant que l’on se découvre, que l’on se dépasse, que l’on construit. Peut-être avons-nous peur, oui. Mais n’est-ce pas justement parce que cela en vaut la peine ?Parlons en ensemble.