23/07/2024
Comment vivre au mieux sa ménopause ?
Bouffées de chaleur, changements du cycle menstruel, troubles du sommeil, troubles de l'humeur, sécheresse… Voici quelques conseils délivrés par nos spécialistes afin de bien vivre sa ménopause.
C’était une conversation tout à fait anodine avec deux femmes que je connais bien. Pas des amies proches. Des personnes que j’apprécie particulièrement dans un cadre professionnel. Elles m’ont demandé les thèmes des émissions de cette semaine et au mot ménopause, il y a eu une double réaction. D’abord un demi-silence, une phrase du genre « ah oui, c’est bien comme sujet ». Et puis dans la foulée, sans que je m’y attende, un flot de mots. Une parole qui se libère. Une douleur avec. Une somme d’interrogations, de peurs, d’appréhension, d’incompréhension. Où il fut question de bouffée de chaleur, de dépression et de vie sexuelle chamboulée. Une discussion bouleversante parce qu’elle révélait à quel point chaque femme est concernée par la ménopause, à quel point surtout, il y a une méconnaissance de cette étape, de nos corps et des remèdes possibles.
Alors avec nos invités, nous allons tenter de comprendre ce tsunami physique et psychique qui touche toutes les femmes, et apporter des réponses à vos questions. Messieurs, restez à l’écoute… Parce que mieux comprendre cette période, c’est aussi mieux appréhender la relation avec vos compagnes et vos amies aussi.
Passage obligé dans la vie d’une femme, la ménopause demeure un sujet tabou dans notre société. Encore trop de femmes se retrouvent isolées, mal informées, face à ce bouleversement physique et psychique dont elles n’osent parler. Si elle touche toutes les femmes, chacune traversera cette période de sa vie différemment. L'âge, qui se situe en moyenne autour de 51 ans, ne sera pas le même, ni la durée de la préménopause qui peut varier de 2 à 9 ans enfin certaines se plaindront de symptômes tandis que d'autres n'en auront quasiment pas.
Vers une réhabilitation du Traitement Hormonal de Ménopause ?
Bouffées de chaleur, libido en berne, sommeil altéré, douleurs articulaires, autant de symptômes qui viennent perturber l'existence de beaucoup de femmes en période de préménopause et la liste n'est pas exhaustive, on recense jusqu'à 34 symptômes. Le Docteur Mouly, gynécologue, chirurgien et cancérologue, s'étonne de l'ignorance médicale en ce qui concerne la ménopause. Il trouve les médecins généralistes peu impliqués et s'étonne que les gynécologues à 93% des femmes ne prescrivent pas davantage de traitements hormonaux de ménopause (THM) pour soulager leur patientèle. Seulement 5% des femmes ménopausées bénéficient actuellement d'un traitement hormonal de ménopause contre 30% il y a 40 ans.
La faute à une étude américaine en 2002 qui a établi un lien entre l'augmentation de cancer du sein et l'utilisation de ces traitements. Il explique qu'à l'époque, il y a eu un amalgame entre les hormones utilisées aux USA et les hormones françaises « Le premier traitement hormonal de la ménopause a été inventé aux États-Unis en 1940, avec des hormones qui dérivaient d'œstrogènes du cheval. Ils ont ensuite associé des progestatifs de synthèse parce qu'il fallait protéger l'utérus, car ils sont rendu compte que cela créait des cancers de l'utérus. En France, nous avons depuis 1970, des traitements qui sont à base d'hormones naturelles bio-identiques, avec des patchs qui ne passent pas par la bouche et des progestatifs dérivés de progestérone naturelle, contrairement aux méfaits de la progestérone de synthèse ». Une nouvelle étude américaine de 2022 réhabilite les THM « en juillet 2022, les mêmes qui ont montré et mis au pilori le traitement hormonal de la ménopause disent surtout : prenez des traitements hormonaux de la ménopause le plus tôt possible, sans limite de durée, avec les hormones françaises et européennes, qui sont les bonnes hormones ».
Les solutions naturelles
En alternative aux traitements hormonaux de ménopause, bon nombre de remèdes naturels existent pour soulager les symptômes :
• la phytothérapie notamment le safran qui est un anti-dépresseur naturel
• l'hypnose réduit de 70 à 75% les bouffées de chaleur
• le yoga
• l'acupuncture
• l'auriculothérapie
Ne pas négliger l'aspect psychologique
Aux symptômes physiques, s'ajoute un bouleversement psychique qui est souvent sous-estimé. Le Docteur Mouly, auteur de Ménopause, tout peut changer explique « à la période de la préménopause, vous avez 30 % des femmes qui ont ce qu'on appelle le brouillard cérébral, cette période de vulnérabilité qui, quand on interroge bien la femme, on voit qu'elle a des antécédents, le baby blues, des choses qui se sont mal passées, qui ressortent à cette période-là. Et les psychiatres vont vouloir la mettre sous antidépresseurs ou anxiolytiques alors que dans 80 % des cas, un rééquilibre hormonal, que ce soit de l'allopathie ou de la phytothérapie va permettre de traiter cela et de ne pas mettre la patiente sous traitement antidépresseur ».
Laurence Haurat voit dans la ménopause, l'occasion de faire sa révolution. Elle parle dans son livre La révolution ménopause de double révolution. « Pour moi, il y a une révolution à deux niveaux. Il y a une révolution intime personnelle, c'est-à-dire un tour à faire sur soi-même, un 360 degrés pour essayer de poser un peu ce qu'on veut pour sa vie, pour les 30 ou 40 années qui nous restent à vivre en tant que femme. La deuxième révolution est beaucoup plus sociétale, autrement dit de poser enfin ce mot et cet état pour qu'on soit écoutées, traitées, accompagnées et que l'on puisse même l'anticiper. Parce que la ménopause, elle, commence à poser à bas bruit ces éléments au fil de la vie. Et il y a tout un tas de choses que l'on fait étant jeune, sans réaliser à quel point on va provoquer des dégâts sur notre corps, éventuellement même psychologique, au moment de la ménopause ».
Marie Pavlenko, autrice de la BD Moi je veux être une sorcière-Ménopause, le dernier tabou, s’est beaucoup documentée sur le sujet. Elle trouve particulièrement intéressante une approche avancée par des chercheurs sociologues et anthropologues comme quoi la ménopause serait une construction sociale « depuis très longtemps, la femme est réduite dans nos sociétés à sa corporéité, c'est-à-dire à ses fonctions de reproduction. Une fois qu'elle n'est plus utile à la société, on a envie de la laisser sur le bas-côté. Dans sa BD, elle a voulu mettre en avant une femme qui sait ce qui lui arrive, qui comprend son corps, sait être à l'écoute de celui-ci, et surtout qui est capable de s'extraire de cette vision : tu es ménopausée donc tu es bonne à jeter. Celle-ci est convaincue que lorsque les femmes ont conscience de cela et qu'en plus, elles sont écoutées, elles peuvent avoir des symptômes, mais ne vont pas les vivre comme un couperet et la souffrance n'est pas la même parce que ce n'est pas investi de la même façon ».
* Dr Michel Mouly est gynécologue et obstétricien à Paris spécialiste de la chirurgie gynécologique et mammaire, cancérologie et obstétrique.
📖 Ménopause : tout peut changer - Robert Laffont 2022 et chez Pocket 2023
Source: France Inter
