09/06/2021
CW : violences sexuelles, pédocriminalité, culture du viol
*Pourquoi on est plus au 23 ?*
Au départ il y avait une tête de bite. Un pochoir sur un carreau, à la peinture noire, avec un message évocateur « Nous te baisons, tu aimes ». Au départ pour nous il y a l’idée que l’art est comme toute chose, attaquable, questionnable, parcouru de dominations qui nous malmènent. Ça peut être beau aussi, ça peut être chouette. Là non, ça sonnait comme une menace de viol, c’était peut-être pas l’intention mais on s’en fout. On n’était pas les premières personnes à trouver cette ‘’œuvre’’ problématique. Du coup, quelqu’un.e a attaqué la tête de bite, barbouillé de peinture la menace de viol.
Et ça leur a pas plu du tout.
Ça leur a pas plus, aux personnes du 23, qu’on remette en question leur idée de l’art. Une idée de l’art qu’on trouve bourgeoise : l’Art c’est beau, c’est grand, c’est au-dessus des gens, faut pas y toucher, pas le censurer, si l’Art t’écrase ou te fait du mal c’est ton problème, c’est fait pour rester là, ou dans une cloche en verre. C’est l’art des écrivains antisémites, des chanteurs mysogines et des comiques racistes, des producteurs violeurs, des musiciens pédocriminels et des propriétaires complaisants qui applaudissent des deux mains tout ce système.
Choc de cultures politique, les discussions ont été nombreuses, et longues et mouvementées. C’est du conflit, c’est pas confortable, ça bouleverse, mais on est ok avec ça. C’est parfois dur mais on est ok avec ça parce qu’on trouve ça sain. Le conflit ça évite les silences qui desservent les personnes oppressées, et ça évite la compromission.
En revanche, il s’est passé quelque chose lors de l’une de ces discussions qui n’est pas ok. Une personne du 23, Slo, a cru bon de nous expliquer sa vision de l’art en nous mettant sous les yeux un dessin. La représentation d’une femme nue se faisant violée par des symboles religieux. Un dessin complaisant et malsain, pornographique tellement puant de ‘’male gaze’’ (regard masculin). Puis, retirant son t-shirt, dévoila sous celui-ci un autre t-shirt représentant Emile Louis, et, au cas où quelqu’un.e ne saurait pas qui c’est, rappella le sourire aux lèvres que c’était un pédocriminel, violeur d’enfants handicapé.e.s. C’était mis en scène, prémédité et Slo a clairement pris du plaisir à faire tout ça. Aucune précaution, ça nous a mis mal, en colère. On aurait voulu l’arrêter, le couper, lui demander de fermer son carnet à dessins et sa gu**le, lui mettre un coup de pied dedans ou de poing dans la face. Mais on pouvait pas, il était soutenu par ses potes et agir ainsi aurait couper court à toutes possibilités de dialogues avec les autres personnes du 23. Nous le savions que ces personnes ne toléraient pas que des victimes refusent de se laisser faire. Sa violence à Slo, elle était ok à leurs yeux. Aucune place pour la notre, même pas en potentialité, alors qu’elle était réactionnelle à des comportements et des discours problématiques. Car, tout de même, une personne du Placard a manifesté : « J’ai envie de te mettre mon poing dans ton visage. »
Ça leur aura suffi.
Le lendemain, alors qu’on avait statué toustes ensemble (avec les gentes du 23 donc) qu’on se laissait deux semaines avant d’en reparler et de prendre des décisions, Slo demandait une AG exceptionnelle du 23 pour exclure le camarade qui l’avait menacé, en prenant soin de bien décontextualiser : il n’était même pas dit que les menaces étaient contre lui, ni mentionné le contexte dans lequel elles avaient été proférées. La demande d’AG de Slo a été accepté par les personnes du 23. 3 jours plus t**d, 10 membres du 23 votaient l’exclusion du Placard du lieu, après qu’on leur ai fait comprendre qu’il n’y avait pas moyen de soutenir la demande d’exclusion de notre camarade.
Tout cela n’était de toute manière qu’une excuse.
Parce que lorsqu’un membre du 23 avait dit qu’il souhaitait tabasser une personne qui s’était introduit dans le 23 pour y dormir quelques temps auparavant , la question de l’exclusion, même temporaire, n’avait même pas été évoquée. Parce que ce qui gêne les membres du 23 c’est qu’on remette en question la position de supériorité de l’artiste, pas la violence physique. Ce qui les as notamment conduits à tolérer un fana du nazisme pendant des mois fut un temps.
On nous laissait jusqu’à la fin du mois pour partir, c’est-à-dire 10 jours. C’était précipité et illégitime, grégaire et injuste.
S’en ai suivi une envie d’en découdre, de pas être sage… On avait l’impression d’en avoir pris plein la gu**le et d’avoir étaient dépossédé de toutes réactions par les postures soi-disant neutre de certaines personnes du 23 (ou encore un exemple de comment cette neutralité entretient les positions de pouvoir). On a calé une journée pour déménager toustes ensemble et certain.e.s sont allé recouvrir leur ch****es de blagues misandres histoire de titiller un peu leur posture de punk trashos. On a aussi fait un faux PV d’AG à la date de la réunion qui devait avoir lieu mais qui avait été torpillé par leur AG précipité où iels avaient voté notre exclusion. Un détournement du PV original qui attestait de notre exclusion. Volontairement risible, pour se moquer de la manière dont ça avait été fait.
Mais, même avec humour, il y a des personnes qui ne supportent pas qu’on remette en question leur fonctionnement. Du coup la date de notre départ leur convenait pas et le déménagement a été avancée de force. On est arrivé un dimanche pour un atelier prévu au Placard ce jour-là, 5 jours avant la date de notre déménagement, et on a été menacé de voir nos affaires répandues sur le trottoir si nous ne partions pas tout de suite. Et ça nous a mis.e.s hors de nous. Les insultes de notre part n’ont pas été retenues, on a volé, cassé des trucs, pété la serrure de notre local, écrit des insultes sur les murs « Punk réacs », « sacs à m***e »… On revendique cette attaque, tout ça c’est rien par rapport à notre déception, et à ce qu’iels ont silencié de nos revendications/réactions. On pensait trouver refuge dans un endroit au sein duquel les discussion politiques étaient possibles, on y a trouvé des gen.te.s prêt·e·s à défendre bec et ongle les comportements crades de leurs potes.
On nous aura beaucoup taxé d’être méprisant.e.s dans cette histoire. Accusation plutôt confortable quand on s’acharne à dissimuler le conflit et à esquiver la remise en question. Nous accuser de mépris, plutôt que de reconnaitre qu’on était en colère contre vous. Nous n’avions pas de mépris pour les personnes du 23, nous étions en colère. Nous nous sommes faché.e.s avec des personnes et nous avons fini par en détester certaines. Et nous avons des raisons d’être en colère. Renvoyer tout ça à du mépris c’est une sale tentative d’étouffer les raisons et de transformer la situation. On passe de « On s’est fâché avec les personnes du Placard, voilà pourquoi, les raisons de leur colère et pourquoi on est pas d’accord avec elleux » à « Les personnes du Placard sont des ados puériles avec qui on a été très très gentil.le.s et qui ont été très très méchant.e.s. » Et c’est d’autant plus malhonnête que les personnes du 23 ont visiblement tentées de répandre l’idée que nous étions à l’origine de la rupture de la discussion avec elleux, alors que clairement, c’est le petit numéro de Slo qui a fait exploser en vol tout espoir de dialogue. Mais c’est votre pote, donc vous lui passez ça.
On nous aura aussi taxé d’autoritarisme. Voir carrément accusé d’être des fachos. Argument d’autorité s’il en est, car reposant sur quoi ? C’est autoritaire de barbouiller une œuvre complaisante avec la culture du viol ? C’est autoritaire d’être en colère ? De casser des trucs ? De voler des trucs ? D’insulter quelqu’un de sac à m***e ? Quant à l’emploi de l’insulte facho : c’est de la m***e d’accuser les premières personnes avec qui tu t’embrouilles de « facho », surtout quand tu traines dans les mobs antifascistes, « facho » ça a un sens, ça s’emploie pas comme ça pour désigner n’importe qui. Faîtes nous des vrais reproches au lieu de juste essayer de ranger tout le monde de votre coté en utilisant des arguments d’autorité et en assumant pas votre part du conflit.
Donc voilà l’histoire, il reste surement des trucs à détailler. On est ok pour continuer d’en parler si des personnes ont du mal à se positionner ou n’y voit toujours pas très clair, n’hésitez pas à venir nous en parler, à nous envoyer un mail.
On s’est fâché avec les personnes du 23. C’est pas la première fois qu’on se fâche avec des gen.te.s et ça sera surement pas la dernière fois. Parce que y’a des trucs qui nous tiennent à cœur, parce qu’on a décidé de prendre le monde au sérieux et parce que nous sommes de celleux qui en avons assez de nous écraser.
La culture du viol c’est insupportable. Les violences faites aux enfants c’est insupportable. Les propos antiféministes c’est insupportable. Les ‘’artistes’’ qui défendent leur liberté d’écraser les autres sous couvert de liberté de créer et de liberté d’expression, c’est insupportable.
Tchao les artistes !