03/10/2024
L'AMOUR ET LA DEPENDANCE
Extrait du livre: Vision spirituelle de l'EnnéagrÂMmE
Ce que nous appelons habituellement l’amour dans nos relations provient le plus souvent d’un manque d’amour, d’un besoin d’amour plus ou moins important (la passion amoureuse en est une expression).
Je ne parle pas ici du sentiment amoureux, qui est une affection profonde, une attirance plus ou moins puissante envers une autre personne et qui varie dans le temps. Je parle de la passion obsessionnelle, celle qui focalise toute notre attention sur une personne ou une chose, lesquelles deviennent pour nous notre raison de vivre. Je parle aussi de cette passion/dépendance, qui se transforme souvent en haine de l’autre quand ce dernier se met à regarder ailleurs, ou en indifférence quand elle ne remplit plus son rôle. Je parle enfin de cette passion, qui part d’un grand vide intérieur, de cette soif puissante de ressentir enfin ce sentiment merveilleux qui nous fait nous sentir vivants. Lorsque ce sentiment se présente à nous à travers une forme quelconque (homme, enfant, animal, métier), nous nous jetons corps et âme sur elle, exigeant qu’elle comble notre vide intérieur, qu’elle étanche cette soif intense.
La voilà, la tyrannie de l’amour et son cri du cœur : « Aimez-moi ! Il faut que tu m’aimes, que tu m’écoutes, que tu fasses attention à moi, que tu me protèges, que tu me rendes fier. »
Elle part toujours d’un besoin que l’autre doit combler, et prend des formes très subtiles, comme le fait d’utiliser les liens d’amitié pour parler de soi, des heures durant, sans tenir compte de l’autre. Elle se manifeste aussi à travers ces personnes autocentrées sur elles, exigeant notre écoute attentive et sans faille, ne se demandant même pas si cela nous intéresse vraiment, se vexant quand, faute d’énergie, nous demandons grâce ou inventons une raison pour nous échapper.
Il faut dire que l’amour est notre premier besoin et que nous en sommes tous carencés, certains plus que d’autres.
J’observe que même ceux qui disent en avoir reçu beaucoup dans leur enfance présentent souvent des manques, ont des comportements addictifs, compulsifs. Certainement car, au fond d’eux-mêmes, ils ressentent que ce qu’ils ont reçu n’était pas gratuit, mais correspondait plutôt à l’expression d’un amour camouflant une peur profonde. Comme ces mères qui, insatisfaites de leur vie et en grand manque d’affection, focalisent toute leur attention sur leurs enfants, quitte à les étouffer. La peur de se retrouver seules et sans affection leur fait construire un personnage qui va utiliser toutes les expressions de l’amour sans que cela en soi véritablement. Un peu comme cette vieille pub de Canada Dry : « Ça a le goût de l’amour, la couleur de l’amour, la forme de l’amour, mais ce n’en est pas. » C’est juste un moyen de survivre, de recevoir un peu d’affection dans un monde qui en est dépourvu.
J’exagère le trait, bien sûr, car les choses ne sont pas aussi simples, nous avons souvent, dans nos intentions ou nos actions, un mélange des deux. Parfois, c’est un véritable amour qui nous anime, et parfois, c’est le besoin. Nous sommes les seuls dans l’instant à savoir exactement où commence l’un et où finit l’autre.
Seul ceux qui ont reçu dans leur enfance un amour pur, sont remplis et capables eux-mêmes d’aimer vraiment. Les autres font ce qu’ils peuvent, utilisant de multiples stratégies pour combler leur vide.
S’activer, courir à droite et à gauche en est une. Cela nous donne l’impression d’être vivants, d’ « être dans le mouv’ », d’être utiles ou importants.
Quand on rentre chez soi le soir, on allume la télé ou on écoute la radio. Faire du bruit, surtout éviter le silence, éviter de se retrouve seul face à soi-même, face à la réalité de ce sentiment si désagréable.
Notre société entière vit dans le bruit et l’agitation, c’est dire si le mal-être est grand. Le manque d’amour est le seul responsable de tous les méfaits de notre civilisation, absolument tous.
Sans doute est-il temps de faire le bilan, de poser les armes, d’arrêter de courir à la recherche d’un bonheur éphémère ? Sans doute est-il temps d’affronter notre peur, notre vide intérieur et d’aller voir ce qui se cache derrière ?
Derrière ce vide se cache un plein que seul le silence révèle, car tout comme le bruit naît du silence, tout comme les objets naissent de l’espace, l’amour naît de la conscience, ce vaste océan où tout est connecté.
Le silence, l’espace et la conscience ne font qu’un.
L’amour n’est que la prise de conscience que tout est UN.
Pour sentir ce UN, il faut faire taire la division en nous et tout ce qui nous sépare de cette unité. C’est là, et seulement là, que l’amour se trouve.
Le reste du temps, nous vivons dans un amour partiel, focalisés sur la division entre une espèce et une autre, une race et une autre, une personne et une autre, un désir et un autre. Le monde n’est que l’expression de qui nous sommes. Le monde est divisé car nous sommes divisés intérieurement, l’explication apparaît d’elle-même.
La bonne nouvelle, c’est qu’un jour, nous retrouverons cette unité. Seuls ou ensemble, peu importe, nous la retrouverons car en vérité, nous ne l’avons jamais perdue. Elle a toujours été là et sera toujours là. Cette unité est notre véritable essence. Nous ne pouvons pas la perdre, mais simplement l’ignorer pour expérimenter la division et le monde que nous connaissons.
Certains sont fatigués de cette expérimentation et commencent à se poser des questions, des personnes comme vous, qui lisez ce texte. D’autres veulent encore y goûter. Chacun est libre et il n’y a pas de meilleurs choix, il faut juste accepter les conséquences de ses choix.
La division et le manque d’amour permettent de vivre des expériences que l’amour et l’unité ne permettent pas, et vice-versa. Soyons juste conscients de cela, ce n’est déjà pas si mal.
Christophe de la famille Itier
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