
08/10/2025
Le non-jugement : sagesse ou abdication de soi ?
Le principe du non-jugement, souvent érigé en pilier des traditions spirituelles, se veut une invitation à la compassion, à la suspension de l’impulsivité mentale, et à l’ouverture du cœur. Pourtant, lorsqu’il est mal compris ou appliqué de manière rigide, il peut se muer en une forme d’aveuglement volontaire, exposant l’individu à des dérives et à des abus.
La première dérive : le paradoxe communautaire
Il est ironique de constater que les milieux qui prônent le non-jugement sont parfois ceux où le jugement est le plus virulent. Derrière les discours d’amour universel et d’élévation, se cachent souvent des dynamiques d’exclusion, de hiérarchisation spirituelle, et de condamnation subtile. Le non-jugement véritable ne consiste pas à nier les différences ou les erreurs, mais à les observer sans précipitation, avec discernement et humilité....en reconnaissant que chaque être suit un chemin singulier, souvent invisible à nos yeux.
La deuxième dérive : l’effacement du discernement
Certaines âmes sincères, dans leur volonté de vivre cet idéal, en viennent à dissocier leur jugement de leur intuition. Elles confondent la suspension du mépris avec l’interdiction de penser, et se privent ainsi de leur boussole intérieure. Or, le jugement, lorsqu’il est conscient et bienveillant, est une faculté précieuse de l’esprit humain. Il ne s’agit pas de mépriser ou condamner, mais de DISCERNER.
C’est ce discernement qui nous protège, qui nous guide, qui nous permet de dire « non » à ce qui nous détruit et « oui » à ce qui nous élève.
Une métaphore simple pour mieux comprendre : le champignon vénéneux
Refuser de juger un champignon vénéneux sous prétexte de non-jugement serait absurde. Reconnaître sa toxicité n’est pas un acte d’orgueil, mais un acte de lucidité. Il en va de même pour les relations humaines : certaines présences nourrissent, d’autres empoisonnent. Savoir les distinguer est une forme d’intelligence, non de cruauté.
Le jugement "discernement" comme gardien du vivant
Le mental, loin d’être un ennemi, est un outil sacré lorsqu’il est au service de la conscience. Il nous permet de créer, de comprendre, d’analyser et de choisir. Renier cette faculté revient à se priver de notre capacité d’agir dans le monde, à devenir vulnérable à toutes les manipulations. Le non-jugement ne doit pas être une abdication de soi, mais une invitation à juger avec sagesse, sans haine, sans précipitation, et avec une profonde écoute de notre ressenti.
Cnudde MCh