25/09/2025
Nous vous partageons le discours d'ouverture de la Marche de cette seconde édition de la Mad Pride à Saint-Brieuc.
En cette seconde édition de la Mad Pride, nous souhaitons renverser les représentations que la société se fait de la folie, c'est-à-dire: la marginalité, l'anormalité, l'irrespect des règles sociales établies. Les troubles psychiques sont des réalités scientifiques et médicales. La folie est une construction sociale, qui se mesure selon l'irrespect des codes sociaux dominants. La norme érige toujours cette muraille entre eux et nous, entre vous et nous. Perçue comme négative dans le regard de l'Autre, la folie est pourtant un éclairage, une capacité à accéder à d'autres niveaux de réalité. Notre Marche incite au questionnement, à la réflexion, à défaire les préjugés. Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour clamer que la folie est un symbole de force et d'unicité.
Nous affirmons qu'être usager en santé mentale fait partie de la diversité. Ce n'est pas quelque chose dont il faut avoir honte ou se cacher. La santé mentale ne peut pas être linéaire en continu. Elle peut être fragilisée par différents facteurs: sociaux, économiques, culturels,etc. Un cinquième de la population présentent un trouble psychique chaque année, soit 13 millions de français. Pourtant, on peut entendre ou lire chaque jour ces mots: hystérique, assisté-e, mongolien-ne, bête-s, teubé-e-s, etc. Ce sont des étiquettes posées sur les individus à partir desquels se construisent des catégories de plus en plus stigmatisables. Les conséquences de la psychophobie sont directes et massives: exclusion dans la société, à l'école, en entreprise, accès au logement, à la culture, moqueries, rabaissement, violences...
Les minorités sont invisibilisées et réduites au silence au niveau national. Ici, dans nos terres reculées, le département des Côtes d'Armor est en majorité agricole. Saint-Brieuc est une ville de taille moyenne. La diversité est compliquée à accepter pour une partie de la population. Nous avons pu le constater à de nombreuses occasions. Par exemple, la veille de la Marche des fiertés en 2023 à Saint-Brieuc, des tags homophobes sont apparus au centre-ville et un élu avait été menacé. Nous sommes pourtant des citoyens comme les autres. Nos modes de pensée, considérées comme décalés ou divergents, constituent une richesse pour la société.
Nous défendons le choix, la dignité et les droits humains dans les soins de santé mentale. Le DSM (manuel de classification objective de symptômes psychiatriques) est considéré comme une référence mondiale en psychiatrie. Celui-passe complètement à côté de la souffrance psychique – et de son origine – qui amène l'individu à tel ou tel comportement. Prenons l'exemple d'une personne, taisant de multiples traumas subis dans l'enfance et développant des symptômes s'apparentant à un trouble de stress post-traumatique. Le psychiatre se cantonnera uniquement aux symptômes et remplira une ordonnance mais ne prendra pas en compte les antécédents de tous ordres. La souffrance psychique ne peut s'enfermer dans des cases à cocher. Elle est le reflet d'autres souffrances empêtrées les unes aux autres. Nous réclamons une prise en charge individualisée et adaptée, du personnel soignant formé, un renforcement des moyens matériels et humains et une réhumanisation du soin.
Nous exigeons l'abolition de la contention. Alors qu'elle ne possède aucune vertu thérapeutique, elle continue d'être utilisée avec des justifications qui vont du manque de personnel à la sécurité des patients et des soignants. La contention est un traumatisme, une mesure de contrôle, une pratique d'entrave. Savez-vous que la contention ne se résume pas seulement à des sangles? Par exemple, une personne hospitalisée dont le psychiatre a prescrit le port du pyjama bleu, alors que les autres patients sont en tenue civile, est une forme de contention. Savez-vous qu'une personne souffrant d'un trouble psychique et ayant été victime de violences sexuelles, subit des réminiscences de ses traumas lorsqu'elle est attachée? Traumas sur traumas sur traumas... Existe-t-il une issue possible dans ce cas de figure ? La contention apparaît comme le symptôme le plus insupportable d'un système inégalitaire. Il existe pourtant des alternatives: espaces d'apaisement calmes et sécurisés, formation des professionnels aux techniques de désescalade verbale et d'écoute active.
Nous pensons tout particulièrement à toutes celles et tous ceux qui nous ont quitté, victimes d'un re**rd de diagnostic, d'une mauvaise prise en charge, d'incompréhension, d'indifférence...