20/06/2025
Non, la souffrance ne rend pas plus fort.
(Réflexion sur une idée reçue.)
“Tout ce qui ne me tue pas me rend plus fort.”
Une maxime célèbre, souvent citée, parfois brandie comme un talisman.
Mais si c’était une illusion ? Une croyance à déconstruire ?
L’écrivain Jean-Christophe Grangé, dans Le Passager, renverse cette idée avec une lucidité tranchante :
« La souffrance n’endurcit pas. Elle use. Fragilise. Affaiblit. L’âme humaine n’est pas un cuir qui se tanne avec les épreuves. »
Dans ma pratique de psychothérapeute, je retrouve cette vérité :
La souffrance, lorsqu’elle n’est pas entendue, accompagnée, traversée, isole, crée des complexes, installe des névroses. Elle ne forge pas nécessairement la force, au contraire, elle peut briser.
Alors, que fait la thérapie ? Elle ne promet ni bonheur perpétuel, ni anesthésie des douleurs. Elle offre un espace pour tenir, comprendre, intégrer. Elle aide à cultiver la fermeté et la patience, à se réapproprier ce qui a été vécu. Non pour nier la douleur, mais pour l’inscrire dans une narration vivable.
La vie s’accomplit dans un équilibre entre la joie et la peine. Entre l’ombre et la lumière. Et dans cet entre-deux, ce n’est pas la douleur en soi qui rend plus fort, mais ce que nous en faisons, quand nous sommes accompagnés, écoutés, reconnus. Cela s’appelle la résilience. Mais n’en faisons pas non plus une injonction. Car la résilience n’est pas un superpouvoir individuel, elle est le fruit d’un processus, parfois lent, parfois douloureux, toujours singulier.
Ce qui nous rend plus fort, c’est rarement le choc lui-même.
C’est la capacité à continuer d’être vivant malgré ce choc.