
10/08/2025
Voilà un écrit qui résume bien celle ci..🙏 merci pour ce beau message et surtout bon courage à vous de la part d' une guerrière en rémission...😏
RÉMISSION
Un mot qui ressemble à un miracle, pourtant, c’est arrivé presque sans prévenir, comme une phrase que l’on n’attendait plus. Assis face au médecin, les mains encore crispées sur les accoudoirs, vous guettez ses lèvres, son souffle, la moindre inflexion de voix. Et puis ça tombe, net, sec, presque léger : « Vous êtes en rémission. » On devrait se lever, danser, crier et appeler tout le monde. On devrait pleurer de joie, se précipiter dehors, goûter chaque nuance de la lumière. Mais non, rien ne vient. Le corps reste assis. L’âme, elle, vacille. Parce qu’on ne vous a pas annoncé la vie, on vous a annoncé un entre-deux. Une parenthèse, une rémission.
Avant, tout était simple. Douloureux, mais simple. Il y avait un combat à mener. Le cancer était là, bien présent, identifiable, traçable. Il avait un nom, un stade, un protocole. Votre vie tournait autour des soins, des perfusions, des salles d’attente, des fameux chiffres à surveiller. Chaque jour avait un sens, celui d’endurer et d’avancer. Vous n’étiez pas libre, mais vous étiez occupé à survivre.
Et voilà qu’un matin, on vous rend votre liberté. Enfin, appelons ça, une forme de liberté. Plus de traitements, plus de piqûres, de chimiothérapies ni d’immunothérapie, plus de machines au ronronnement angoissant. Mais aussi, plus de garde-fous. Plus de justification au fait d’aller mal, de ne pas avoir d’énergie, d’être fatigué, triste, au regard perdu. On vous laisse reprendre le cours de votre vie. Sauf que cette vie-là, vous ne savez plus très bien comment elle fonctionne.
Avant, votre temps était mesuré. Il s’écoulait comme les gouttes de poison salvateur dans le cathéter. Chaque minute avait du poids. Chaque seconde pouvait être la dernière. On vous parlait d’aujourd’hui, parfois de demain, rarement d’après-demain. Vous viviez au ras du réel, avec une intensité brûlante. Et maintenant ? On vous dit quoi ? Reprenez en main le cours de votre existence. Repartez et revivez. Mais revivre, comment ?
Car même si l’on vous dit que vous ne mourrez plus, vous n’y croyez qu’à moitié. Tous les trois mois, tous les six mois, vous retournez dans cette même salle d’attente. Ces fameux « contrôles ». Avec ce mot qu’on ne dit pas mais que l’on redoute, la récidive.
C’est là, toujours en arrière-plan. L’idée que la « chose » peut revenir. Tapie dans un recoin du foie, du sein, du poumon, du cerveau, etc. L’idée que le répit n’est peut-être qu’un sursis.Alors, que faire de ces jours que l’on nous offre si chaleureusement ? Comment les remplir sans avoir peur de les gâcher ? Comment retrouver une trajectoire quand tout ce qu’on avait, c’était une urgence à survivre ?
Autour de vous, les autres sourient. Ils sont contents pour vous. « C’est une bonne nouvelle ! » « Tu vas pouvoir reprendre une vie normale ! » Normale ? Ce mot sonne bizarre dans votre tête. Vous, vous n’êtes plus « normal ». Vous êtes passé de l’autre côté. Et même si vous souriez pour ne pas inquiéter ceux qui vous entourent, vous avez changé.
Votre corps a changé. Vos limites ne sont plus les mêmes. Votre esprit aussi. Il est plus lent peut-être, ou plus profond. Il réfléchit autrement. Il sait ce que c’est que l’attente, le vide, le silence des couloirs d’hôpital. Votre regard sur les choses s’est déplacé. Vous ne voyez plus la vie comme avant. Ce n’est pas du tout un feu d’artifice. Plutôt une sorte de douce brume, faite de gratitude, de fatigue, et d’un brin d’effroi. Oui, vous êtes en rémission. Mais la vie, elle, n’est plus jamais comme avant.
Il y a un deuil à faire, en silence : celui de l’ancien soi. Celui d’une époque où l’on ne se demandait pas ce que c’est, vraiment, qu’être vivant. Où l’on prenait tout pour acquis. Et puis il y a, en germe, une renaissance possible. Mais elle ne ressemble pas à une course effrénée. Elle est lente, intérieure, humble. Elle exige du temps, du respect, et de la patience envers soi-même.
Rémission. Ce mot est un seuil. Un passage. Ni la fin, ni le début, Mais un entre-monde. Et il faut du courage pour y habiter. Prends soin de toi. Et n’oublie pas…
Même en rémission, tu n’es pas en pause. Tu es en transformation.
Virginie
Armand
PS Je précise que je ne suis pas Virginie. Ce sont des extraits de mon dernier roman. Je publierai demain la suite et fin : La récidive. Pour lire la première partie : " L'annonce "
https://www.facebook.com/groups/645545160242607/permalink/1308397740624009/
En ce qui me concerne, j’ai un cancer du poumon stade 4, inopérable.