20/08/2020
La crise existentielle est régulièrement sujette à débat, mais aussi des articles de presse et des émissions de télévision. « Les SIMS » est un jeu ‘’de simulation de vie’’, mondialement connu, qui, en transposant notre société, intègre dans son jeu, une étape de la vie liée à la crise existentielle des adultes. Au cours de leur vie, les SIMS peuvent vivre une crise existentielle qui induira des questionnements, le choix de faire une thérapie à l’hôpital, indiquée comme très
chère.
Depuis plusieurs années la société est en crise et les individus qui la composent également. Le non-sens s’est installé dans la société et chez les individus en quête de sens. La société propose moins de repères, ce qui accentue les crises existentielles noogènes et sociogènes. En tant qu’accompagnant existentiel, nous avons à la fois la responsabilité d’accompagner ceux qui souffrent et ceux qui sont en quête de sens, d’élever leur niveau de conscience et de responsabilité, mais aussi d’acculturer la société à cette « la valeur universelle du sens » devenue une urgence d’utilité publique. C’est en travaillant la dimension préventive et curative de la crise existentielle, que la guérison sociétale et celle des hommes est rendue possible et souhaitable.
Dans une première partie de la r***e de la littérature, nous aborderons le sujet de la crise existentielle puis comment répondre au besoin de sens pour « exister » en tant qu’individu. Dans une seconde partie nous présenterons l’accompagnement existentiel centré sur le besoin de sens, en privilégiant plusieurs auteurs majeurs pour notre recherche. Dans une partie suivante
nous nous appuierons sur la retranscription d’une séance d’accompagnement existentiel tout en l’appliquant avec la thérapie d’acceptation et d’engagement dite ACT, que nous exposerons en détail. Nous pourrons alors présenter les résultats ainsi que la réponse à la problématique posée. Enfin, la discussion permettra de confronter les résultats à la r***e de littérature, en lien avec la problématique posée et l’expérimentation de la pratique. Nous conclurons par l’examen critique du travail effectué et par l’argumentation de son intérêt dans la perspective professionnelle de la pratique future du praticien.
La problématique à laquelle nous allons tenter d’apporter une réponse par ce travail de recherche est :
Comment l’ACT et l’accompagnement existentiel peuvent aider à sortir de la crise existentielle et à faire émerger le sens ?
1- La r***e de la littérature
1.1 L’accompagnement existentiel
1.1.1- Définition de l’accompagnement existentiel
L’accompagnement existentiel ou thérapie existentielle, est une thérapie basée sur un processus de connaissance de soi, d’affirmation de soi, voire de réaffirmation, à partir de l’identité, du sens et des valeurs. C’est une analyse profonde qui touche tous les niveaux de la personne, de ses ressources, de son environnement et accompagne un cheminement vers la réalisation de soi d’une personne en souffrance ou en perte de sens, ou en crise existentielle. L’accompagnement existentiel comprend l’homme, au plus profond de son être, comme un être responsable. Elle se comprend elle-même comme une analyse existentielle centrée sur la responsabilité. Son but ultime est d’amener l’homme, et particulièrement le névrosé, à prendre conscience de sa responsabilité face à la vie (Frankl, 2012). Beaucoup de personnes consultent aussi pour des problèmes existentiels très profonds : des personnes âgées qui sont confrontées à une maladie grave ou à l’angoisse de la mort, d’autre personnes à l’approche de la retraite se demandent ce qu’ils vont faire de tout ce vide qui les attend... L’accompagnant existentiel aide dans la construction ou la reconstruction d’un nouvel équilibre pour mieux tenir debout, en accord avec soi-même et avec ses valeurs, en appui sur toutes les vertèbres de son identité Lenhardt (2008).
1.1.2 Histoire de l’accompagnement existentiel
Le vrai départ de l’analyse existentielle en thérapie, est marqué par le travail au début du XXe siècle de Karl Jaspers en Allemagne, l’influence des philosophies phénoménologiques de Hursserl et Heidegger et aussi de l’existentialisme de Jean-Paul Sartre, mais surtout par le travail en santé mentale des psychiatres suisses Ludwig Binswanger et Medard Boss (1913 à 1988). Les analystes existentiels sont restésS quasiment inconnus, jusqu’à l’introduction de leur pensée aux Etats-Unis grâce à Rollo May (1958).
Plus récemment citons l’analyse existentielle ou logothérapie de Viktor Frank et la thérapie existentielle d’Irvin Yalom. En 2015, Vincent Lenhard situe l’accompagnement existentiel au cœur de la relation d’aide comme un des éléments de la colonne vertébrale de l’humain. L’accompagnant existentiel est alors, selon ses termes, un ostéopathe du sens. Depuis 2015, Didier Pleux propose une psychothérapie existentielle.
1.1.3 L’accompagnement existentiel, thérapie de la responsabilité
Dans la biographie de Frankl (2012) on retrouve « un modèle de sens et de responsabilité » (Allport, 1959) associé à la dimension spirituelle de la personne évoquée dans « l’inconscient spirituel ». Et « Viktor Frankl a d’ailleurs proposé que soit érigée, sur la côte Ouest des Etats Unis, une statue de la Responsabilité qui ou qui serait le pendant de la statue de la Liberté de la côte Est » (Lecomte, 2007).
La responsabilité est fondamentale dans l’analyse existentielle. Elle se situe dans le fait de prendre conscience de soi et d’être Soi ce qui signifie à la fois, ne pas donner raison à nos déterminismes pour donner vie à qui nous sommes vraiment dans notre authenticité et répondre au sens de notre vie.
L’analyse existentielle a pour but de nous aider à prendre la responsabilité de notre vie en prenant conscience de qui nous sommes vraiment., en profondeur, dans notre identité authentique. Il s’agit d’un travail de connaissance de soi au service de notre existence dont le but est de proposer de sortir des répétitions, des soumissions et de les remplacer par un changement en profondeur qui va nous permettre d’être nous-mêmes, et d’être acteur et responsable de notre vie.
En thérapie existentielle, il importe de travailler en profondeur l’identité de la personne mais aussi d’en appeler à l’existence spirituelle, c’est-à-dire au sens de la libre responsabilité qu’elle représente à nos yeux. A l’envers du déterminisme, il s’agit de réveiller la conscience de cette liberté et responsabilité qui fait de nous une personne individuée. Selon Frankl (2012), la personne spirituelle, seule, crée l’unicité, la totalité de l’être humain. Elle crée cette totalité, spirituelle, psychique et physique. Il insiste sur le fait que l’homme n’est pas qu’un corps et un psychisme mais que sa totalité intègre son être propre, spirituel, pour être intégré. Pour Yalom (2008), la notion de responsabilité n’est pas rattachée au fait de s’individuer et de donner un sens à sa vie comme pour Frankl (2012), puisqu’il considère dans la vision sartrienne, qu’être conscient de sa responsabilité c’est être le créateur de son self, de son destin (Yalom, 2008) alors que pour Frankl (2006) le destin nous est donné. Yalom souligne un point primordial quand il écrit que dans notre société actuelle, le tableau psychopathologique s’est transformé en conséquence et que les syndromes névrotiques classiques se sont raréfiés, que le patient d’aujourd’hui est davantage aux prises avec la liberté qu’avec des pulsions refoulées. Ce patient, qui n’est plus poussé de l’intérieur par ce qu’il a à faire ou tiraillé de l’extérieur par ce qu’il « doit » ou « devrait faire, est aux prises avec la problématique du choix, en d’autres termes ce qu’il veut faire. De manière croissante, les patients entreprennent une thérapie sur la base d’un malaise vague et mal défini. Auparavant, nous prenions le temps de la maturation et des expériences pour affronter notre processus d’individuation. Aujourd’hui nous avons la chance, même si c’est « vertigineux, nous dit Yalom » de constater que cette couche disparaît au profit d’une individuation plus proche de notre identité, avant quarante ans. Les modèles sociétaux déterminés n’existent plus et nous devons les trouver à l’intérieur de nous pour ensuite les mettre en action, en lien avec notre identité profonde. Ce qui est vertigineux est un vide existentiel, à la fois source de prise de conscience, mais également source de peurs et de crises existentielles faisant surgir ou resurgir le besoin d’un retour sur soi nécessaire, pour mieux repartir et définir le sens de notre vie. La chance consiste alors à devoir considérer notre individuation plus tôt, et à nous réaliser. Rollo May (1976) considère que la capacité de prendre conscience constitue la base de la liberté psychologique.
Tous les spécialistes de l’accompagnement existentiel reconnaissent la « responsabilité » comme fondement de l’analyse existentielle et pour Lenhardt (2008), l’individu en bonne santé est quelqu’un qui a des problèmes, qui les reconnaît et les traite, en prenant la responsabilité de sa vie. Une personne en bonne santé est celle qui recouvre la capacité d’assumer toute entière son histoire personnelle, de développer sa capacité d’agir sur son destin et à prendre sa responsabilité. Elle pose la question de l’accès au sens de l’existence moins en termes de causalité (« pourquoi ? ») que de finalité (« pour quoi ? »). Nous pouvons dire alors que quelqu’un qui n’est pas en bonne santé, dans le sens existentiel, est quelqu’un qui n’est pas libre et responsable, en souffrance parce que bloqué par ses déterminismes, ce qui l’empêche de reconnaitre son identité et le sens de sa réalisation.
La psychothérapie existentielle de Pleux (2016) se doit d’aider à mieux « être » dans le réel. Contre la psychanalyse traditionnelle, symbolique, parfois occulte, il propose une psychothérapie existentielle fondée sur la responsabilité et la liberté individuelle de construire son existence. Sur son site « didierpleux.fr », Pleux (2017) nous confronte en effet au réel dans l’ici et maintenant, tout en prenant en compte le récit de vie qu’il va disputer dans un travail de désapprentissage utile à une reconstruction, dans le but d’aider son patient à reprendre ou retrouver sa responsabilité.
Nous sommes là dans une analyse de quatre auteurs qui prennent en compte le fait que l’accompagnement existentiel est un accompagnement dans l’ici et maintenant et dont l’enjeu va consister à aider la personne accompagnée à retrouver « sa responsabilité » associée « à sa liberté », afin de sortir des déterminismes pour enfin vivre sa vie, la sienne, et non pas celle qu’on aurait voulu pour elle ou qu’elle a cru que l’on attendait d’elle, ce que Jung nomme « le processus d’individuation». Au processus d’individuation nous ajoutons le processus d’individuaction©. Nous connaître vraiment est une condition pour nous réaliser pleinement, néanmoins elle est insuffisante. Il conviendra une fois avoir intégré « je suis » déterminé, affirmé, ressenti, de trouver le moyen de nous exprimer à notre juste place pour nous déployer. C’est alors que nous passons de l’individuation à l‘individuaction© et que « le sens en action » est alors à l’œuvre. Il faudra peut-être se faire accompagner pour apprendre à marcher dans nos nouveaux pas et pour nous montrer les angles morts, les chemins de traverse à éviter, pour nous diriger vers l’autonomie et la réalisation de Soi de l’adulte libre que nous serons devenus quand nous serons « individué » et donc libre et responsable. Nous découvrirons nos ressources profondes, enfouies, oubliées qui ont toujours été là. Il nous faudra traverser ce processus pour découvrir notre identité authentique et ce à quoi elle permet d’accéder. C’est alors que nous ressentirons au fond, de l’amour, de la joie, qui nous montreront avec distance, notre égo et celui des autres, parfois cachés sous des masques, car nous aurons vécu notre individuation. Voir les personnes « telles qu’elles sont vraiment » avec « ce que nous sommes vraiment » nous fait alors changer de position de vie, de posture de vie. L’individuaction© est l’étape qui suit l’individuation, phase d’individu-action dont le but est de mettre en action et dans le monde notre identité authentique retrouvée, pour réellement « exister ». Face aux crises de sens que nous sommes amenés à traverser, dans lesquelles chacun cherche « sa juste place » et à sortir du non-sens, nous comprenons alors non seulement les processus engendrés par la crise, mais aussi comment en sortir, comment « nous réveiller, nous révéler » et ainsi devenir responsable et volontaire pour appréhender qui nous sommes vraiment en redevenant acteur de notre vie.