15/11/2025
💊 𝐋’𝐢𝐧𝐜𝐮𝐥𝐭𝐮𝐫𝐞, 𝐧𝐨𝐮𝐯𝐞𝐥 𝐨𝐩𝐢𝐮𝐦 𝐝𝐮 𝐩𝐞𝐮𝐩𝐥𝐞
L’inculture n’est pas seulement un manque de savoir -
savoir penser, agir, faire, vivre, être.
C’est un manque de regard.
C’est refuser d’apprendre pour comprendre, d’élargir son horizon.
C’est croire que le monde s’arrête au bout de son nez.
L’inculture fait des dégâts silencieux.
Elle rétrécit les vies, déforme les conversations, bloque les imaginaires.
Elle transforme la nuance en menace, l’art en provocation,
la différence en faute.
Là où la culture relie, l’inculture sépare.
Là où la culture éclaire, l’inculture éteint.
Face à une œuvre, une pensée, un geste artistique,
il faut savoir regarder - comme un tout, un tableau, une intention.
Mais l’inculture critique ce qu’elle ne comprend pas.
Elle attaque là où elle devrait contempler,
elle parle fort pour combler son vide.
Une autre difficulté s’ajoute.
Nous nous sommes habitués à tout obtenir en un clic.
La pensée se veut rapide, les réponses instantanées.
On ne cherche plus : on scrolle.
On ne lit plus : on survole.
Combien trouveront mes mots ?
Combien prendront le temps de les lire ?
Lire prend du temps. On nous en a dépossédé.
Et puis il y a la patience -
la patience de comprendre, qui s’efface dans une culture du réflexe.
Comprendre, apprendre : deux verbes issus de l’idée de “prendre avec”. Or apprendre demande du doute, de la lenteur, de l’esprit dit critique - trois choses que l’ère du clic rend presque suspectes.
Lire est aux antipodes de la culture du clic.
Lire oblige à entrer dans une phrase, une idée, une voix.
La culture du clic, elle, exige l’inverse :
aller vite, tout survoler, sauter d’un stimulus à l’autre.
Le clic donne l’illusion de savoir -
la lecture donne la possibilité de comprendre.
Le clic consomme.
La lecture transforme.
Le clic réduit la pensée à un réflexe.
La lecture l’élève au rang d’acte.
Socrate disait : « Je sais que je ne sais rien ».
Ce n’est pas de l’ignorance :
c’est une posture d’humilité, une invitation à chercher.
Et c’est précisément pour cela qu’il faut continuer à apprendre :
lire, questionner, ralentir un peu,
laisser nos certitudes être déplacées.
Lire un livre ne résout pas tout.
Lire n’est pas la panacée, bien sûr que non.
Les livres ne guérissent pas la vie,
ils n’effacent ni les blessures ni les contradictions.
Mais ils accomplissent quelque chose d’essentiel :
ils ouvrent le regard.
Ils enseignent la nuance, l’altérité, le mouvement de la pensée.
Ils rappellent que rien n’est aussi simple que ce que crie la surface.
Lire, apprendre, s’exposer aux idées,
ce n’est pas « savoir plus que les autres ».
C’est refuser les couloirs étroits d’une fu***ng vérité.
Comme disait Pablo Neruda : « La vérité, c’est qu’il n’y a pas de vérité. »
Apprendre-lire, c’est accepter d’être traversé, bousculé, élargi.
C’est tenir l’esprit allumé dans un monde qui l’endort.
Apprendre-lire non pas pour avoir raison,
mais pour rester ouvert.e.
Pour essayer de comprendre au lieu de condamner.
Pour ne pas se laisser envahir par l’inculture qui juge tout ce qu’elle ne sait pas être sa vérité.
La culture n’est pas une accumulation de savoirs.
C’est un état, un geste, une manière d’habiter le monde.
Et ce geste-là, même imparfait,
ouvre toujours plus de lumière que l’inculture.
Pendant que l’on apprend moins,
que l’on lit moins,
que l’on scrolle plus,
une autre mécanique s’installe, dangereuse, insidieuse :
l’inculture devient le nouvel o***m du peuple.
📸 1984 - " Il est bien possible que nous soyons en train de nous enfoncer dans une ère dans laquelle deux plus deux feront cinq quand le leader le décidera." - George Orwell