
31/07/2025
Benzodiazépine et Alzheimer : le risque augmente avec la durée de l’exposition
10 Sep 2014 | Par Inserm (Salle de presse) | Santé publique
Contact Chercheur
Sophie Billioti de Gage
Chercheur Inserm
Unité Inserm 657 « Pharmaco épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de sante sur les populations » Inserm/ Université Bordeaux Segalen
Tel : + 33 5 57 57 95 12
sophie.billiotidegage@u-bordeaux2.fr
Contact Presse : presse@inserm.fr
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Les chercheurs de l’Unité Inserm 657 « Pharmaco épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de sante sur les populations » rendent compte de nouveaux résultats concernant l’association entre les benzodiazépines et la démence.
Dans une étude publiée dans le British Medical Journal (BMJ), ils confirment que
_____l’utilisation de benzodiazépines pendant 3 mois ou plus était associée à un risque accru de développer la maladie d’Alzheimer après 65 ans.
L’étude cas-témoins révèle que :
_____ la force de l’association augmente avec la durée de l’exposition.
C’est pourquoi les chercheurs recommandent de contrôler la bonne utilisation de ces molécules en limitant les prises aux périodes pour lesquelles elles sont recommandées.
Les benzodiazépines sont prescrites par les médecins dans le cadre de symptômes anxieux et de troubles du sommeil pour une durée recommandée de quelques semaines.
*** En 2012, une étude de l’Unité Inserm 657 « Pharmaco épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de sante sur les populations » avait montré, sur une cohorte française, que :
_____les sujets consommant des benzodiazépines présentaient environ 50% plus de risque de développer une démence comparés à ceux qui n’en ont jamais consommé.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs se sont attachés à confirmer l’association dans une nouvelle cohorte en étudiant en particulier la potentielle relation dose-effet.
Les chercheurs ont étudié la base de données de la Régie d’Assurance Maladie du Québec (RAMQ) pour analyser le développement de la maladie d’Alzheimer chez un échantillon de patients > 66 ans résidant au Québec (Canada) et ayant eu une prescription de benzodiazépines.
==> 1 796 cas de maladie d’Alzheimer ont été identifiés sur une période d’au moins 6 ans. Pour réaliser l’étude cas-témoins, ils ont ensuite comparé chacun de ces cas avec 7 184 personnes en bonne santé dont l’âge, le s*xe et la durée de suivi correspondaient.
Les résultats montrent que :
_____l’utilisation de benzodiazépines pendant 3 mois ou plus était associée à un risque accru (jusqu’à 51 %) de développer ultérieurement la maladie d’Alzheimer.
« La force de l’association augmente avec la durée de l’exposition et avec l’utilisation de benzodiazépines à longue durée d’action, par opposition aux benzodiazépines à courte durée d’action » explique Sophie Billioti de Gage, chercheur à l’Inserm.
En conclusion, les chercheurs rappellent que même si le lien de cause à effet n’est pas prouvé, l’association plus forte observée avec des expositions à long terme « renforce la suspicion d’un lien direct possible, même si l’usage des benzodiazépines peut également être un marqueur précoce d’un état associé à un risque accru de démence. »
Le recours aux benzodiazépines est fréquent et préférentiellement chronique au sein de la population âgée. Pourtant les benzodiazépines sont des molécules utiles pour la prise en charge des troubles anxieux et de l’insomnie transitoires. Les auteurs incitent donc à la sensibilisation et au respect des bonnes pratiques associées à leur utilisation telles que des prescriptions justifiées et de courte durée.
« Cela permettrait de veiller à limiter l’utilisation de ces molécules à quelques semaines, une durée pour laquelle les chercheurs n’ont pas observé d’effets délétères sur le risque de démence ultérieur » souligne Sophie Billioti de Gage.
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Sources
Benzodiazepine use and risk of Alzheimer's disease: case-control study
Utilisation des benzodiazépines et risque de maladie d’Alzheimer : étude cas-témoin
Sophie Billioti de Gage 1, Yola Moride 2, Thierry Ducruet 3, Tobias Kurth 4, Hélène Verdoux 5, Marie Tournier 5, Antoine Pariente 6, Bernard Bégaud 6
1INSERM, U657-Pharmacoepidemiology, Université de Bordeaux, F-33000 Bordeaux, France sophie.billioti-de-gage@u-bordeaux.fr.
2Research Center, University of Montreal Hospital Center, Montreal, Canada Faculty of Pharmacy, University of Montreal, Montreal, Canada.
3Research Center, University of Montreal Hospital Center, Montreal, Canada.
4Inserm Research Center for Epidemiology and Biostatistics, U897-Team Neuroepidemiology, F-33000 Bordeaux, France University of Bordeaux, College of Health Sciences, F-33000 Bordeaux, France.
5INSERM, U657-Pharmacoepidemiology, Université de Bordeaux, F-33000 Bordeaux, France Centre Hospitalier Charles Perrens, F-33000 Bordeaux, France.
6INSERM, U657-Pharmacoepidemiology, Université de Bordeaux, F-33000 Bordeaux, France.
PMID: 25208536 PMCID: PMC4159609 DOI: 10.1136/bmj.g5205
Abstract
Objectives: To investigate the relation between the risk of Alzheimer's disease and exposure to benzodiazepines started at least five years before, considering both the dose-response relation and prodromes (anxiety, depression, insomnia) possibly linked with treatment.
Design: Case-control study.
Setting: The Quebec health insurance program database (RAMQ).
Participants: 1796 people with a first diagnosis of Alzheimer's disease and followed up for at least six years before were matched with 7184 controls on s*x, age group, and duration of follow-up. Both groups were randomly sampled from older people (age >66) living in the community in 2000-09.
Main outcome measure: The association between Alzheimer's disease and benzodiazepine use started at least five years before diagnosis was assessed by using multivariable conditional logistic regression. Ever exposure to benzodiazepines was first considered and then categorised according to the cumulative dose expressed as prescribed daily doses (1-90, 91-180, >180) and the drug elimination half life.
Results: Benzodiazepine ever use was associated with an increased risk of Alzheimer's disease (adjusted odds ratio 1.51, 95% confidence interval 1.36 to 1.69; further adjustment on anxiety, depression, and insomnia did not markedly alter this result: 1.43, 1.28 to 1.60). No association was found for a cumulative dose 180 prescribed daily doses) and with the drug half life (1.43 (1.27 to 1.61) for short acting drugs and 1.70 (1.46 to 1.98) for long acting ones).
Conclusion: Benzodiazepine use is associated with an increased risk of Alzheimer's disease. The stronger association observed for long term exposures reinforces the suspicion of a possible direct association, even if benzodiazepine use might also be an early marker of a condition associated with an increased risk of dementia. Unwarranted long term use of these drugs should be considered as a public health concern.
Résumé______________________________________________________________________________
Objectifs : Étudier la relation entre le risque de maladie d’Alzheimer et l’exposition aux benzodiazépines a commencé au moins cinq ans auparavant, en considérant à la fois la relation dose-réponse et les prodromes (anxiété, dépression, insomnie) éventuellement liés au traitement.
Conception : Étude cas-témoin.
Cadre : La base de données du programme d’assurance maladie du Québec (RAMQ).
Participants : 1796 personnes ayant reçu un premier diagnostic de la maladie d’Alzheimer et suivies pendant au moins six ans auparavant ont été appariées à 7184 témoins selon le s*xe, le groupe d’âge et la durée du suivi. Les deux groupes ont été échantillonnés aléatoirement parmi des personnes âgées (âge >66 ans) vivant dans la communauté en 2000-09.
Principale mesure de résultat : L’association entre la maladie d’Alzheimer et l’utilisation des benzodiazépines a commencé au moins 5 ans avant que le diagnostic ne soit évalué en utilisant la régression logistique conditionnelle multivariable.
>>> L’exposition aux benzodiazépines a d’abord été prise en compte, puis catégorisée selon la dose cumulée exprimée en doses quotidiennes prescrites (1-90, 91-180, >180) et la demi-vie d’élimination du médicament.
Résultats : L’utilisation des benzodiazépines a été associée à un risque accru de maladie d’Alzheimer (rapport de cotes ajusté 1,51, intervalle de confiance à 95% 1,36 à 1,69; un ajustement supplémentaire sur l’anxiété, la dépression et l’insomnie n’a pas modifié ce résultat de manière marquée : 1,43, 1,28 à 1,60).
Aucune association n’a été trouvée pour une dose cumulée 180) et avec la demi-vie du médicament (1,43 (1,27 à 1,61) pour les médicaments à action courte durée et 1,70 (1,46 à 1,98) pour les médicaments à action longue).
Conclusion : L’utilisation des benzodiazépines est associée à un risque accru de maladie d’Alzheimer.
L’association plus forte observée pour les expositions à long terme renforce la suspicion d’une possible association directe, même si l’utilisation des benzodiazépines pourrait également être un marqueur précoce d’une condition associée à un risque accru de démence. L’utilisation injustifiée à long terme de ces médicaments devrait être considérée comme une préoccupation de santé publique.
© Billioti de Gage et al 2014.
PubMed Disclaimer
Conflict of interest statement
Competing interests: All authors have completed the Unified Competing Interest form athttp://www.icmje.org/coi_disclosure.pdf (available on request from the corresponding author) and declare that TK has received investigator-initiated research funding from the French National Research Agency and the US National Institutes of Health within the past two years and honorariums from BMJ and Cephalalgia for editorial services; MT received honorariums as a speaker from Astra Zeneca, BMS, and Janssen; AP participated in studies conducted by the Clinical Research Center of the Bordeaux Teaching Hospital and funded by Novartis, Sanofi-Aventis, Lundbeck, and Vivatech, none of which were related to the present study.
4 Inserm Research Center for Epidemiology and Biostatistics, U897-Team Neuroepidemiology, F-33000 Bordeaux, France;
5 University of Bordeaux, College of Health Sciences, F-33000 Bordeaux,
France;
6 Centre Hospitalier Charles Perrens, F-33000 Bordeaux, France
British Medical Journal (BMJ), 9 octobre 2014
doi=10.1136/bmj.g5205