15/08/2025
📚Les éclats du miroir brisé
Quatre ans. Quatre longues années passées à dévaloriser l’amour que je partageais avec ma femme, comme si celui-ci était une évidence, une routine inaltérable. Pendant tout ce temps, je n’ai jamais raté une occasion de la tromper. Pour moi, c’était une nécessité, un refuge contre l’ennui et la monotonie. À force d’habitude, elle ne me faisait plus vibrer — elle ressemblait désormais à une sœur quand elle enfilait ses lingeries sensuelles, espérant raviver une flamme que j’avais moi-même éteinte.
Plusieurs fois, elle m’a surpris. Chaque fois, ses larmes, brûlantes, ont coulé sans retenue.
La première fois, elle est entrée dans un tumulte de cris et de colère, cassant ce qui se trouvait sur son chemin. En pleurs, elle avait fui vers son père, cherchant conseil, consolation.
— « Tu sais, ma fille, » lui avait-il dit d’une voix grave, « les hommes ne peuvent s’empêcher de tromper… L’amour peut parfois devenir une lassitude. Reste auprès de tes enfants. Si tu le quittes pour un autre, l’autre te trompera aussi. »
Ce jour-là, son père devint pour moi un allié inattendu. J’ai divisé mon salaire en deux et confié une part à ma femme, convaincu d’avoir l’aval tacite de celui-ci. Mon beau-père, presque mon complice, avait validé ma trahison.
Elle s’est tue, apaisée par ces mots, tandis que moi, je prenais de plus en plus de liberté. La tromperie est devenue une habitude. Plus de cachettes, plus de peur.
Un samedi soir, après une balade, un silence étrange m’accueille à la maison. Nos enfants dorment dans le salon, sans moustiquaire, entourés de moustiques avides. Je hurle son nom, sans réponse. La maison est déserte, ou presque : ni dans la cuisine, ni dans les chambres, elle n’est.
Je tente de l’appeler. Son téléphone sonne dans le vide.
L’heure avance. Il est déjà une heure du matin. L’angoisse me serre la poitrine.
Puis, vers une heure et demie, une voiture s’arrête devant le portail. Un jeune homme descend. Ils échangent des mots, longuement, tandis que je suffoque, pris d’un malaise soudain. Mes mains tremblent, mes jambes flageolent.
Le jeune homme prend la main de ma femme et l’embrasse – un ba**er lent, langoureux et dévastateur.
Je me laisse tomber dans le fauteuil du salon, le souffle court, la fièvre montante. Je me couvre d’un pagne, essayant de contenir la tempête intérieure.
Quand elle revient, resplendissante, je ne peux retenir ma colère :
— « D’où reviens-tu à cette heure ? »
— « J’étais à un rendez-vous, chéri. Je suis désolée, je ne t’ai pas prévenu… Ça faisait longtemps que je n’avais pas ressenti ça : être aimée, choyée... »
Je me calme, mais l’inquiétude et la douleur restent violemment gravées. Elle part se doucher, pleine de joie, absorbée par son téléphone.
Le lendemain, je débarque chez ses parents, furieux et prêt à rompre. Son père téléphone à ma femme, la colère dans la voix :
— « Tu deviens f***e ? »
Elle répond calmement :
— « Tu sais, papa, les femmes ne peuvent s’empêcher de tromper... Faire l’amour avec la même personne, ça peut être fatiguant. Dis à Jo de rester auprès des enfants, car s’il me quitte pour une autre, elle le trompera aussi… »
Je m’évanouis. Sept jours d’hôpital.
À mon réveil, elle m’avoue la vérité : rien n’est arrivé avec ce jeune homme. Elle voulait seulement que je sente ce que je lui faisais ressentir à chaque infidélité. Une leçon d’égalité.
Mais malgré cette preuve d’amour paradoxale, parfois, les doutes me rongent encore.
— « Est-ce qu’elle n’a vraiment rien fait ? »
— « Et si les discussions continuent secrètement ? »
— « Et si ce ba**er n’était pas si innocent ? »
Ces crises de jalousie me dévorent sans raison, mais le miroir brisé de notre confiance reste difficile à recoller.
L’amour ne peut survivre à l’indifférence ni à la trahison banalisée. Se croire au-dessus des sentiments de l’autre, penser que l’on pourra toujours revenir à la maison, libre et sans conséquence, c’est ignorer que la douleur se répercute des deux côtés du miroir. La fidélité n’est pas seulement un serment, c’est un respect, un choix conscient, un engagement qui alimente la flamme avant qu’elle ne s’éteigne.
Dans le miroir de l'infidélité, on voit toujours deux visages brisés.