01/06/2019
Mon entretien avec l'Association Tonton Saï Saï
Je peine à raconter tout ce que tonton saï saï m’a dit. Les photos, les histoires, les témoignages…"
Tout a commencé par un message court sur WhatsApp.
"Bonjour, nous sommes l’association stop Tonton Saï Saï qui contribue à la lutte contre les abus s….ls sur les mineurs au Sénégal. L’association est créée depuis 2011"
Puis, j’ai reçu le montage vidéo fait sur la manifestation.
La curiosité m'a alors poussé à consulter leur page Facebook. Ensuite, charmée par leur travail audiovisuel, je suis allée personnellement rendre visite à l’association.
Il fallait que je voie de mes propres yeux.
Mais je suis sortie de notre entretien tellement retournée qu’il ma fallut au moins deux heures de temps avant de retrouver mes esprits.
Je ne vous relaterai aujourd’hui que trois situations. Toutes aussi brûlantes les unes que les autres.
Situation 1 :
Les chroniques : mon monstre à moi .
- Elle avait 7 ans. C’est son oncle qui l’a v…ait.
Elle a émigrée en France, et tonton l’a suivi.
Quand elle a entendu parler de l’association, sous couvert de l’anonymat, elle a écrit sa chronique puis l’a envoyé à ATSS.
Cette chronique était devenue une bombe à l’époque sur les réseaux sociaux. Dès le début des premières publications, des victimes ont envahies de témoignages les boites emails de l’association.
Des témoignages, des demandes de soutien psychologique, mais surtout, des plaintes de la part des victimes, contre l’ATSS.
Ces victimes leur reprochaient d’avoir réveillé un refoulement d'un passé d'enfants abusés qui leur collait à la peau. Elles disaient qu’à travers les chroniques, l’ATSS venait de remuer de vieilles plaies qu’elles pensaient être guéries depuis longtemps.
Mon interlocuteur, marié a soudain eu un regard lointain lorsqu'il a commencé à évoquer ce souvenir douloureux. Il se souvient que des victimes traumatisées l’appelaient à 4h du matin pour l’insulter d’avoir ressassé les fantômes du passé.
Il leur fallait trouver une aide extérieure.
Au fils de leurs actions pour porter assistance aux victimes, les membres ont été mis en rapport avec le psychologue Serigne Mor Mbaye.
"Les demandes en soutien psychologiques étaient nombreuse et c’était au-dessus de nos compétences"
Le docteur a alors formé les membres en groupes d’animateurs de sessions de sensibilisation pour un changement de comportement axé sur l’observation et la conduite à tenir.
Ce projet a permis aux parents d’enseigner à leurs enfants des techniques de contournement de situations qui pourraient les mettre en danger.
Observation :
- Baisse des résultats scolaires
- Refus d’aller chez le boutiquier du coin ou de faire la commission chez un tonton ou une tata.
- Des irritations ou des douleurs aux parties intimes
Ce qui nous amène à la situation 2 :
Neikh, Saf.
Ainsi, une maman s’est manifestée et a témoigné.
C’est grâce à l’observation qu’elle s’est rendue compte que son bébé d’un an et demi était victime d’abus s….el.
Une fois, que la bonne était partie au village pour la tabaski, elle s'est mise à changer les couches de la petite.
Ce fut la surprise de sa vie.
A chaque fois qu’elle touchait les organes génitaux du nourrisson pour la nettoyer, ce dernier répliquait en disant neikh, ou bien saf.
Elle qui n’a jamais dit ces mots wolof à ses enfants, tomba des nues.
Choquée, elle alla directement consulter le pédiatre qui a constaté des irritations, puis l’a orienté vers le gynécologue.
Ce dernier lui a alors confirmé le diagnostic final. Le bébé se faisait abuser.
Arrivée à la maison, elle n’eût pas l’esprit tranquille et procéda au même rituel avec des filles de 10 et 15 ans .
Celle de dix ans avait perdu son h***n depuis belle lurette.
Après enquête, le bébé de 1 an et demi a désigné le nom de la nounou.
Quand on demanda aux grandes pourquoi elles n’avaient jamais dénoncé la nounou. Elles dirent qu’elles ne savaient pas que ce n’était pas bien.
Après une enquête approfondie, elles lui avouèrent qu’elle leur disait des mots pas catholiques et leur montrait comment il fallait procéder, avec son propre corps à elle.
Elles sont toutes nées entre les mains de la nounou.
La maman avait entièrement confiance en elle.
Elle a pris 10 ans de prison ferme.
Situation 3
Elle avait huit ans.
T**d la nuit, dans le noir, son oncle l’a amené dans les bois pour abuser d’elle.
Au moment des faits, la petite qui l’a reconnu, lui disait : toton X, tu es en train de me blesser, arrête.
Se sachant démasqué, tonton lui projeta une brique sur le visage, lui cassant ainsi ses deux mâchoires. Ensuite, il la jeta dans une fosse, la couvrit de grosses pierres et cacha le trou avec des herbes et du sable, puis retourna tranquillement à la maison pour dormir.
Comme Dieu aime ses brebis, la petite sorti miraculeusement de ce tombeau construit par son oncle, ami intime de son père.
Les premières personnes qui l’ont rencontré ont d’abord pensé que l’être qui rampait dans le noir, l’air ensanglanté, était un chien accidenté.
Le corps en lambeaux, les deux mâchoires cassées, la petite était dans un état insupportable.
Les parents qui ont eu vent de l’association ont appelés au secours.
Heureusement, une femme ministre de l’époque les a aidé à se rendre à sur place avec une ambulance. Car, il n’y avait aucune possibilité de l’opérer à partir de sa localité.
À l’époque, il n’y avait qu’un seul médecin spécialisé en traumatologie mandibulaire au Sénégal.
Pendant une semaine entière, la petite a vécu en situation d’attente de trouver une place à l’hôpital.
L’opération a finalement eu lieu.
Durant sa réhabilitation, elle est restée 6 mois dans la maison du président de l’association qui a dit :
«La petite pouvait rester pendant une heure devant à regarder un point fixe du mur devant lequel elle s’asseyait.
Elle refusait de se laver. Elle avait horreur de rester enfermée dans une pièce. Elle avait peur des toilettes, des voitures.
L’association l’a mise en relation avec l’école mariama niasse qui a entièrement pris en charge son année scolaire.
Mais ne produisant aucun résultat scolaire, elle est finalement retournée au village.
Son bourreau a écopé de 15 ans de travaux forcés.
Une victoire pour l’association. Une victoire pour l’avocat de l’AJS.
Se parents ont récupéré les compensations de la fillette.
Mais le président de l’association en est sorti scandalisé quand son père l’a accusé d’avoir détruit les liens d’amitié entre son ami et lui.
Selon lui, c’était une erreur de la part de son ami. Et cela ne nécessitait pas une peine de prison aussi lourde.
Le fillette est retournée au village. A ce jour, elle doit avoir 15ans, elle est intraçable. Personne ne sait ce qu'elle est devenue.
Après une prise de bec entre le président de l’association qui a assuré la prise en charge de la petite et le père de la concernée, notre bon samaritain définitivement traumatisé par les évènements, a arrêté toute activité, plié bagages et déposé ses baluchons vers des cieux plus cléments.
C’est la raison pour laquelle il y a eu un ralentissement des activités de l’Association Tonton Saï Saï que je loue pour avoir mené un combat aussi lourd.
Je vous applaudis.
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